La table de la promesse: l’espérance

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Écouter le culte :

Chers amis, chers frères et sœurs, chers enfants,

A table ! Une fois encore, nous vous invitons à table… et en suivant la lecture du chapitre 14 de l’évangile selon Luc, nous nous retrouvons à table dans la maison d’un Pharisien. On se souvient des paroles que Jésus a adressées à ceux qui sont là : si vous êtes invités, ne vous mettez pas à la première place… et si nous faisons une invitation, ne convions pas ceux qui se sentiraient obligés de nous rendre la pareille ! « Invite les pauvres, les infirmes, les boiteux et les aveugles ». Et on se souvient de la dernière phrase de la prédication du diacre Pierre Loup de dimanche passé : C’est bien joli tout ça, mais qu’est-ce que ça va te rapporter ? Eh bien rien ! Absolument rien ! si ce n’est du bonheur ! « Heureux seras-tu parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour ».

Est-ce que ces conseils style « baronne de Rothschild » irritent un convive ou le mot « bonheur » a-t-il fait fantasmer un doux rêveur ? On ne saura pas si la parole que lui adresse un convive veut corriger la parole de Jésus ou la prolonger vers un monde déconnecté du réel : « Heureux celui qui prendra son repas dans le Royaume des cieux »
Je ne sais pas très bien comment comprendre cette nouvelle béatitude, mais je pense que celui qui dit cela est assez pessimiste : il ne croit pas au bonheur sur terre…

Alors loin des pauvres et des misères du monde, nous voilà subitement transportés vers une autre galaxie… vers le Royaume de Dieu, vers cette montagne sainte, où Dieu offrira aux nations des montagnes de viandes grasses et des jarres débordant de vins fins comme aux noces de Cana : « C'est là qu'il supprimera le voile de deuil que portaient les peuples, le rideau de tristesse étendu sur toutes les nations. Il supprimera la mort pour toujours » comme le dit le prophète Esaïe dans le premier texte que nous avons entendu ce matin.

Nous voilà transportés dans le temps de Pâques, de la vie nouvelle et éternelle, dans le temps radieux de la Résurrection ! Alléluia !

Pas si vite ! dit Jésus en ramenant le convive à la table bien tangible du Pharisien, une table bien humaine où prennent place la maladie, le doute, l’hostilité, les passions, le fanatisme et l’injustice. C’est alors qu’il raconte cette « parabole du grand festin » que l’on peut également appeler « parabole des invités ».
Quelqu’un, un roi chez Matthieu, un homme chez Luc, a préparé un banquet et fait un grand nombre d’invitations. Il envoie un serviteur dire aux invités : « Venez, car c'est prêt maintenant. »
J’aime ce « maintenant » ! Le Royaume de Dieu, ce n’est pas plus tard ou ailleurs ! C’est ici et maintenant ! dit Jésus. J’aime cette parabole car elle commence bien !
Le bon dîner de fête fait bien sûr référence au festin dans le Royaume de Dieu, mais dans la Bible, toutes ces expressions, le paradis, la montagne du Seigneur, le Royaume de Dieu, la vie éternelle, recouvrent la même idée : ces images ou ces expressions évoquent une qualité d’être et de vie, une harmonie si profonde et si vraie, qu’elle a une dimension d’éternité. Le paradis, le Royaume de Dieu, la vie éternelle dont parle la Bible, c’est la vraie vie avec Dieu pour ami pour aujourd’hui, en ce monde et pour toujours dans le monde à venir. Pas besoin d’attendre l’au-delà pour commencer à être heureux ! Comme dans cette parabole, c’est maintenant, c’est aujourd’hui que nous sommes invités à nous régaler de ce que Dieu a préparé pour nous, c’est aujourd’hui que nous sommes invités à nous régaler de sa présence et de son amour.

J’ai plus de peine avec la fin de la parabole : « Le maître dit au serviteur : ceux que tu trouveras, contrains-les d’entrer. Mais, je vous le dis, aucun des hommes qui avaient été invités ne goûtera de mon dîner. » Dans une autre bouche que celle de Jésus, dans un autre contexte que l’Évangile, ces paroles passeraient sans problèmes. L’exclusion, le renvoi, l’expulsion, le licenciement, sont des mots bien connus des humains ! Et on connaît aussi fort bien les mots obligation, contrainte, force. On est obligé d’aller à l’école, de payer ses impôts, d’obéir au code de la route… La contrainte et la menace marchent très bien dans toutes sortes de domaines humains… mais tout cela n’est-il pas contraire à l’idée que l’on se fait de l’Evangile ?

Jésus ne dit-il pas que le projet de Dieu, c’est l’amour ? l’ouverture du cœur ? Le maître des Béatitudes ne veut-il pas que nous trouvions du plaisir à vivre et à être heureux ? Et d’ailleurs, si on peut obliger une personne à faire quelque chose, peut-on l’obliger à aimer quelqu’un ? De même, peut-on obliger quelqu’un à croire en Dieu, à aller à l’église ou au caté ? Alors comment comprendre la fin de la parabole ? Pourquoi le maître oblige-t-il les uns à entrer et rejette-t-il ceux qui regretteraient leur première décision ? Cette question nous fait entrer dans la compréhension de ce qu’est une parabole.

Une parabole est une brève anecdote ou une courte histoire qui utilise les événements quotidiens et comporte un message énigmatique ou paradoxal destiné à nous faire réfléchir…
Elle a un côté devinette et on croit que c’est simple à comprendre… Ainsi, dans notre parabole, certaines choses sont évidentes, comme la correspondance entre les différents personnages de la parabole et ceux qu’elle désigne, par exemple :
• qui est l’homme qui invite ? Dieu
• qui est le serviteur ? les prophètes, Jésus, les apôtres… et peut-être chacun de nous, lorsque nous témoignons de notre foi…
• qui sont ceux qui refusent l’invitation ? Jésus vise sans doute ici les Pharisiens et d’une manière plus générale le peuple d’Israël qui n’accepte pas son message, mais aussi toutes sortes d’hommes et de femmes qui nous ressemblent… terriblement !?

Mais d’autres aspects d’une parabole sont plus difficiles à saisir… Plus obscurs, plus durs… Comme chez un caricaturiste, il y a dans la parabole, qui est comparable à une image, des traits plus fins et des traits plus épais… Et lorsque Jésus force le trait, lorsqu’il fait une caricature avec de gros traits noirs, c’est pour éveiller notre intelligence, pour que l’on se pose des questions… pour que l’on soit toujours en chemin.

C’est dans cette catégorie des choses plus obscures à comprendre mais qui nous tiennent en éveil que je rangerais l’exclusion de ceux qui ont refusé l’invitation et l’obligation ou la contrainte qui, dans l’histoire de l’Eglise, a été comprise parfois de manière tragique comme un encouragement à la violence contre ceux qui refusaient de devenir chrétiens. Ce qui est sûr, c’est que le message de cette parabole ne porte pas sur le sort de ceux qui ne répondent pas à l’invitation de Dieu. La parabole met en avant cette invitation incroyable que Dieu nous adresse : Oui toi ! tu es invité… par Dieu ! Oui Dieu, le grand Dieu de l’Univers s’intéresse à toi ! Il t’a créé, il te donne jour après jour le souffle qui soutient ta vie… Il aime tous les humains et veut les rassembler pour les nourrir et faire la fête ! Nous ne le savons peut-être pas, nous ne voyons peut-être pas comment ni pourquoi, mais notre existence a du sens, elle vaut la peine. Nous sommes attendus par Dieu. Voilà un message positif ! Voilà un message joyeux ! C’est ce qu’il faut retenir, en reléguant à la deuxième place le côté obscur, énigmatique ou difficile à comprendre de la parabole !

J’aimerais encore relever une dernière chose qui va au-delà de la lettre de la parabole, mais qui me semble s’adresser à tous ceux qui écoutent la parole de Jésus. Transformés par l’amour et la joie que Dieu met dans nos cœurs, les invités deviennent ceux qui invitent ! De passifs, ils deviennent actifs ! C’est ce qui se passe lorsque nous répondons positivement à l’invitation : Dieu nous prend alors à son service, il nous envoie, comme des messagers, vers une ou des personnes qu’il nous confie pour que nous leur disions combien elles sont importantes, spéciales, et combien elles comptent pour Dieu. On est averti que certains auront toutes sortes d’excuses :
• Désolé ! j’ai trop de travail, mes champs, mon bureau ou mon usine me prennent tout mon temps.
• Désolé ! mes loisirs entre la danse, la peinture, le théâtre, l’équitation et le tennis ne me laissent aucun espace de libre.
• Désolé ! l’amour humain m’empêche de penser à l’amour divin…

Sans doute y en-a-t-il d’autres, mais celles-ci couvrent déjà très bien le champ de l’activité humaine ! Des activités qui ne sont sans aucun doute pas mauvaises en soi, mais qui empêchent celui qu’elles accaparent de rencontrer Dieu, de rencontrer la source et la finalité de notre existence. Jésus nous dit que d’autres invités, ceux que la société humaine abandonne sur les bas-côtés de la prospérité vont venir… Les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux. C’est la liste que Jésus avait précédemment dressée pour nous dire qui inviter à notre table. C’est la liste que Jésus décline dans ses Béatitudes, ce chemin du vrai bonheur. Dans la parabole des invités au Grand festin, Jésus nous dit que le bonheur se goûte à table, à la table du Seigneur, la table du Royaume de Dieu dressée ici et maintenant, au milieu des hommes, table de la foi, de l’amour et de l’espérance.

Amen.

Clôture du culte de l'enfance
Série de trois cultes qui proposent de donner l’eau à la bouche et faire découvrir, au travers des écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament, que la foi – ou son contraire – passe par l’estomac ! Ces trois cultes font également place aux styles et aux formes diverses qui enrichissent la vie cultuelle. Un clin d’oeil aux différentes générations appelées à témoigner ensemble de la même passion gourmande qui les conduisent vers le Grand festin à venir: Heureux les invités au repas des noces de l'Agneau.

Ce dernier culte sera célébré avec des enfants du culte de l’enfance.
Si les premiers cultes invitaient à la foi et à l’amour au travers des textes bibliques ayant pour thème la table, ce troisième culte aborde le thème de l'espérance. A partir de la parabole des invités au grand festin, nous découvrirons que tous ont leur place à la table du Seigneur! Tous invités… toutes les nations, tous les humains… mais qui viendra?

Détails

Avec la participation de
Nelleke de Boer, Josette Humbert, Dorothea Maffli, Jacqueline Roulin et Isabelle Bovard-Reust
Orgue
Jean Pierre Candaux
Musique
Les enfants de la paroisse, accompagnés par Hetty Overeem