Notre mort : accomplissement suprême de notre vie !!!

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"Si le grain tombé en terre ne meurt pas, il reste seul ; mais s'il reste seul, il porte beaucoup de fruit".

Ces paroles ont été prononcées par Jésus au moment d'entrer dans la Passion.

En un raccourci saisissant, elles résument sa trajectoire personnelle. Simple et essentielle, l'image du grain de blé renvoie aux rythmes immuables du Cosmos, dont font partie la vie et la mort. Jésus s'exprime d'une façon telle que l'image s'applique, dans une certaine mesure, à chacun d'entre nous.

Pour commencer, le grain de blé qualifie positivement la vie humaine. Comme le grain est orienté vers de futures moissons, notre vie est appelée à donner du fruit. De même, elle est porteuse d'une dimension qui la dépasse et la projette loin devant elle, "Dieu a mis au coeur de l'homme la pensée de l'éternité" (Ecclésiaste). Ainsi, l'aventure de la vie vaut la peine d'être vécue.

Seulement il faut aussi mourir. Le grain doit mourir, c'est sa loi. C'est l'aspect dur et misérable de ma condition. Cela je l'apprends chaque jour par tout ce qui me renvoie à ma précarité : le deuil, la maladie, le vieillissement, les difficultés de toutes sortes. Je l'apprends par les croix qui jalonnent mon chemin. La tentation la plus commune est alors de nier la mort, d'essayer de passer à côté de ces croix. Seulement le risque est alors grand de passer en même temps à côté de ce qui est important. Si le grain ne meurt, il reste solitaire, stérile, dépourvu de signification.

Ce que me propose l'Evangile est de regarder la mort en face. Se savoir mortel et l'accepter, accueillir ce qui dans l'existence paraît inacceptable, prendre sa croix à bras le corps au lieu de croire qu'on va réussir à y échapper est l'attitude qui, paradoxalement, va permettre à ma vie de se centrer sur ce qui est réellement important. Si le grain meurt, il produit beaucoup de fruit.

C'est du reste ce que nous apprennent les croix que l'on prend. Il n'est pas rare que les gens qui ont connu un deuil douloureux ou qui ont vu la mort de près adoptent une autre échelle des valeurs, plus lumineuse. Il n'est pas rare que la maladie produise en nous une conscience différente du temps et des autres. Il n'est pas rare que les renoncements ou les doutes nous fassent gagner en humanité. Si bien qu'au bout du compte on découvre que le secret de la mort est à chercher au coeur de la vie, comme le secret du vide est à chercher au coeur du plein.

François d'Assise le savait bien, qui dans son "Cantique du Soleil", va jusqu'à parler de "notre soeur la mort". Ce n'est qu'à partir du moment où je deviens, comme disent les philosophes, une conscience de soi sous le regard de la mort que ma vie prend tout son sens.

On pourrait du reste vérifier cela par l'absurde. Que se serait-il passé si Jésus avait voulu éviter la croix ? Très probablement rien. Nous ne serions pas ici et il n'est pas même certain que la mémoire collective aurait conservé le nom de Jésus de Nazareth. C'est au contraire sa vie donnée et sa mort acceptée qui diffusent Jésus à travers les siècles, qui permet à sa parole d'agir aujourd'hui encore et au blé de l'Evangile de nourrir toujours les âmes. On voit que la croix n'interrompt pas, mais transforme et féconde. Elle établit pour l'éternité ce qui a déjà débuté sur terre dans l'amour.

Pour conclure, nous pouvons retirer de l'image du grain de blé suffisamment de confiance pour traverser les crucifiements dont cette vie est faite. C'est seulement à partir de minuit que l'obscurité tend vers le jour. Ensuite, nous pouvons y alimenter notre espérance : si notre mort était, après tout, l'accomplissement suprême de notre vie, qui nous fait accéder à notre visage d'éternité ?

Enfin, se dégage une façon d'être pour tout de suite, bien exprimée par ce proverbe d'Europe centrale :

"Tout ce que tu donnes est à toi, Tout ce que tu prends est perdu à jamais".

Amen.

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