La foi: un bonus pour la vie!

Temple de Saint-Blaise (©Alexandra Urfer Jungen)

Écouter le culte :

Raoul Pagnamenta, pasteur

La vie de chacun de nous est faite de satisfactions et désillusions. Parfois nous achevons un projet et nous sommes fier de nous- mêmes, parfois nous sommes confrontés à un obstacle et nous nous demandons si nous arriverions à le dépasser, parfois nous échouons et nous remettons tout en question.

L’apôtre Paul ne fait pas exception et la deuxième épitre aux Corinthiens est le témoin de défis que la vie lui réserve et de la force qu’il puise dans sa foi en Jésus-Christ. On doit à l’apôtre Paul les débuts de l’annonce de l’évangile autour de la Méditerranée. Il a donné naissance à plusieurs communautés chrétienne, dont l’église de Corinthe. Mais voilà que d’autres prétendus apôtres arrivent dans la région et commencent à mettre en doute les capacités de l’apôtre Paul. Est-ce qu’il est vraiment fait pour l’emploi ? Il a fait de la prison, sa façon de s’exprimer n’est pas assez puissante, il n’accomplit pas assez de miracles et il est souvent rejeté par les autorités politiques. Paul aurait pu réagir et faire valoir ses succès. Il aurait pu énumérer le nombre de communautés qui ont surgit grâce à lui, le nombre de converti, ses origines juives, sa connaissance de la Bible et son éducation auprès des meilleurs maîtres et des expériences spirituelles. Mais il choisit plutôt de mettre en avant ses échecs et ses faiblesses et de parler de comment la foi l’a aidé à se révéler. Car s’il y a un monde visible que nous jugeons selon des critères humains, il y a aussi une réalité qui ne se voit pas et qui nous donne la force de créer et d’affronter les difficultés.

Cette réalité est la foi. Par la foi, l’action créatrice de Dieu agit en nous. Nos capacités humaines sont limitées, et avec l’âge cette limite se ressent davantage. Ce qu’on voit de l’être humain est sujet à la mort, même chez les meilleurs. Mais la foi nous renouvelle, chaque fois que nous nous connectons à nouveau avec Jésus mort et ressuscité, nous reprenons des forces, des nouveaux horizons s’ouvrent à nous, nous ne cédons pas sous le poids de nos faiblesses. La foi nourrit encore la vie de millions de personnes aujourd’hui. Et aussi près de nous, dans notre village, dans notre communauté. Ils passent peut-être inaperçus, mais la foi leur donne l’énergie de créer, la motivation de rebondir et le courage d’assumer ses limites. Sylvie et Philippe vont témoigner de cette force qui le renouvelle, comme jadis l’apôtre Paul.

Témoignage de Sylvie Amstutz

J’aime beaucoup ce passage de l’homme intérieur, de la femme intérieure qui se renouvelle malgré le temps qui passe et qui impacte notre être physique. On entre avec ce passage dans une réalité qui renverse le discours porté sur la vieillesse, la ménopause, la performance, le déclin de nos facultés cognitives et physiques. Personnellement, mon être intérieur se renouvelle quand je peux avoir du temps avec moi-même. Lorsque cette solitude me permet d’avoir un dialogue intérieur, qu’elle me permet de voyager dans les profondeurs de mon intériorité. Le silence et la solitude me rendent réceptive à ce qui est en germe et qui doit advenir, à une forme de créativité. Si je rajoute la marche au silence cela amplifie ce que je ressens. Si au mouvement et au silence, s’ajoute de la beauté, dans la nature par exemple, cela dilate en quelque sorte mes sens, clarifie et épure ma pensée.

Cette posture est celle de se « mettre en retrait », pour aller écouter, ressentir et être dans un état de contemplation et de prière long qui me permettent d’aller visiter, ce que je crois être le cœur profond. Ces respirations en nature inspirent mon activité de créer des forêt- jardins qui imitent la diversité du monde vivant.

Pour Denis Marquet : « Ma vie a du sens si elle peut exprimer qui je suis ». Je crois pouvoir exprimer qui je suis lorsque je peux façonner des forêts-jardins, des paysages comestibles qui soient beaux, abondants, diversifiés, qui témoignent de la reliance et non de la séparation ou de la domination de l’humain avec le monde vivant. Créer des espaces nourriciers me permet de retrouver en quelque sorte «la nostalgie de l’oasis » et me permet de travailler à un rythme qui est celui des saisons et du temps long. J’ai aussi compris ces dernières années que le travail est une partie du tout. Mais pas le tout. L’itinérance en nature ponctue donc mon activité professionnelle. Je pourrais m’arrêter là, mais la manière dont l’être intérieur se renouvelle n’aurait été qu’effleuré. Il y a parfois des portes étroites à passer. Que l’on ne choisit pas. Notre vie nous y invite, à des moments précis de nos vies. Et ces chemins d’épines sont aussi la possibilité d’une révélation. La traversée de ses douleurs, la descente dans ses profondeurs, dans ses obscurités permettent, si elles prennent le temps d’être visitées, d’être rejointe par un chemin de lumière qui unifie. Pour Denis Marquet, ce travail s’opère quand notre conscience s’ouvre à la dimension sombre à l’intérieur de soi. Non pas pour s’y complaire mais pour nommer mon manque. Cette capacité à s’abandonner à ce qui nous dépasse, c’est reconnaître la part de vulnérabilité qui nous habite, l’intégrer, l’accepter et redécouvrir que dans cette fragilité assumée Dieu se révèle et relève. Aller contacter la femme/l’homme intérieur est l’acte envers lequel nous mettons le plus de résistance alors que c’est l’acte le plus libérateur qui soit. 

Dans mon être intérieur se trouve qui je suis, fondamentalement. Cette révélation de moi-même, vécue dans l’unité au Père, enlève toute peur, car elle est révélatrice des valeurs du royaume, actuel et à venir où la peur de vieillir, de mourir, de ne plus être performant, séparé ou seul est supplantée par une dynamique de renouvellement et de régénération continue. Ma vie a donc du sens, quel que soit mon âge, quand elle peut exprimer l’être intérieur que je suis, qui se renouvelle constamment, dans la certitude de sa filiation et la recherche de l’unité relationnelle avec tous et toutes : Dieu, soi-même, les autres et la création. 

Témoignage de Philippe Von Bergen

J’aime à penser que ma foi résonne dans tout l’univers, même si ça peut paraître un peu prétentieux de dire ça. Et en même temps, je crois que le cœur de Dieu bat au creux de moi. Il est là, Présence lovée dans ce vase si fragile que je suis. La confiance, si ténue soit elle, est là tout au fond de mon être depuis une rencontre fulgurante avec le Christ alors que j’avais 10 ans. Son amour m’a enveloppé et me porte encore aujourd’hui sur les chemins de la vie. Même si je me sens souvent cabossé et la tête bien pleine de questions, de doutes, la confiance est là qui surgit parfois comme une fleur qui transperce une dalle de béton… Mes failles, mes larmes permettent aussi, je crois, à la vie de se frayer un passage.

Je suis architecte, un métier, une vie, qui m’ouvre les horizons, Un bouquin, un film, un tableau, un paysage, une fleur, un arbre, une herbe folle, un oiseau, un regard sont tout autant de portes qui ouvrent à la rencontre des êtres et des choses, à une humanité habitée, vécue… Avec de multiples maîtres d’ouvrage, de multiples usagés, de multiples entreprises ou ingénieurs, nous sommes appelés à construire ensemble un lieu, des lieux pour permettre la vie le temps des échanges, de manger, de dormir, d’aimer, de travailler… C’est un vrai défi dans notre monde devenu un peu fou régit par le profit à tout prix. Il faut résister pour que la vie l’emporte toujours au détriment de l’étouffement. Souvent je me lève le matin reconnaissant du souffle qui m’habite. Ce souffle qui se mêle au souffle de Dieu. Ce souffle qui se renouvelle de jour en jour comme dit l’apôtre Paul. Je me retrouve toujours devant une page blanche à écrire, à dessiner, à essayer de m’ouvrir à ce qui advient, à douter, à pleurer de joie, à pleurer d’angoisse …et puis je me sens parfois si dépasser, si incapable…

Silence. Silence dans le tumulte des pensées, des informations, des sentiments, … J’ai besoin de faire silence. C’est vital pour moi. C’est une question de respiration. Dans le silence, l’espace se dilate pour laisser le tout Autre qui m'habite vibrer en moi dans mon corps, dans mon cœur. Le Christ se laisse alors voir autour de moi …dans la réalité de ma journée… une confiance retrouvée…mais parfois ça prend beaucoup de temps. Je me sais aimer de Dieu. Mais lorsque je me sens aimer par Dieu, je me prends à aimer, à avoir la force et l’envie de m’ouvrir à la rencontre, à créer par-delà mes manquements… L’autre jour, j’ai fait mon premier grand tour à vélo depuis mon opération du dos, il y a une année. 80 km. J’étais si heureux à travers le Vully et le Seeland de sentir le vent, le soleil, et d’être entouré par de magnifiques champs et voilà qu’un couple me dépasse et que je colle à leur roue. Après 2 ou 3 km, je me dis : « Mais qu’est-ce que tu es en train de faire ? ça va trop vite ? » Mon souffle est haletant, mon corps se fait sentir ... Alors je reprends mon rythme, le rythme que mon corps me permet. Je retrouve le souffle, je retrouve la joie… A son rythme, à son souffle ouvert à l’autre et au Tout Autre. C’est peut-être ça vivre la communauté humaine.

« Je me sens immergé dans l’atmosphère, comme le poisson est immergé dans l’eau » en paraphrasant Emanuele Coccia. Je rêve d’un monde inclusif ou l’amour, la bonté, la beauté soient les moteurs plutôt qu’un monde exclusif nappé de compétition, de guerre et d’enlaidissement … Dieu que le monde est si dur parfois… Le Christ, mon compagnon de route, je le découvre tout au long des Évangiles et dans cette lettre de Paul aux Corinthiens comme Celui qui donne de l’espace aux êtres et aux choses, comme Celui qui permet à chacun et à chacune d’exister, comme Celui qui donne la vie sans jamais l’étouffer. Je découvre toujours plus qu’Il nous ouvre à notre humanité profonde. 

Comme dit un chant de Taizé : « Jésus, ma joie, mon espérance et ma vie »

Au 1er siècle de notre ère, Paul de Tarse, missionnaire chrétien et fondateur de communautés, rencontre l’hostilité d’autres prédicateurs qui doutent de son autorité. Ces doutes rencontrent un large écho dans la communauté de Corinthe que l’apôtre Paul a lui-même fondée. Au lieu de se justifier il se tourne vers Dieu, il ne se vante pas des qualités qu’il possède et des résultats obtenus, mais il mets en avant ce qu’il a reçu de Dieu. C’est surtout la foi qui lui a permis d’affronter les difficultés et qui lui donne la force de répondre à ses détracteurs.

Deux paroissiens témoigneront de la façon dont la foi les aide à assumer les défis de la vie d'aujourd'hui.

Détails

Avec la participation de
Sylvie Amstutz, Philippe von Bergen et Nicole Wasser
Orgue
John Michet
Musique
Chorale «La chanson d’Hauterive» sous la direction de John Michet, avec Carole Nyfeler, soliste