Avancer avec confiance vers l'avenir

Temple Farel, La Chaux-de-Fonds (©AUJ)

Écouter le culte :

Première partie : Exode 13, 17-22 (Thierry Muhlbach)

Compagnes et Compagnons de foi,

Au moment où nous rejoignons le peuple d’Israël, un acte fondateur, un acte essentiel, vient de se produire. Après près de 400 ans d’esclavage en Égypte, Dieu vient de libérer les siens. Nous connaissons ce récit durant lequel il nous est rapporté comment le sang d’un agneau sans tache apposé sur le linteau des portes des Hébreux a protégé leurs premiers-nés de la mort.

Nous allons suivre aujourd’hui une première étape de la marche qu’ils vont désormais entreprendre dans le désert du Sinaï avant de pouvoir entrer dans le pays promis « là où coulent le lait et le miel ». Je propose également que nous prenions en compte pour notre propre marche vers l’avenir les éléments que le récit met en avant.
 

1. Cette marche vers l’avenir a une première caractéristique :

Dieu conduit le peuple sur un chemin bien plus long que le chemin direct par la côte. Ce chemin va permettre d’éviter l’armée des Philistins. Deux arguments sont avancés par notre récit pour expliquer cela. Premièrement, le peuple, bien qu’il soit en « ordre de bataille », reste fragile et affaibli. Deuxièmement, le peuple, devant les difficultés, risque de vouloir retourner en Égypte.

Dieu tient compte de l’état de ses troupes, si je puis m’exprimer ainsi, il en connaît l’état réel et cherche à prendre soin d’eux. Je crois que Dieu se comporte de la même manière avec nous, prenant soin de nous et tenant compte de notre état pour que nous soyons en mesure d’affronter l’avenir.  


2. Les ossements de Joseph

Le second élément constitutif de cette marche vers l’avenir est le fait que Moïse prenne avec lui les ossements de Joseph selon le serment que Joseph avait exigé de ses frères en Genèse 50. Juste avant la mort de Joseph, les frères avaient pu se parler « cœur à cœur » (verset 21) et faire la paix les uns avec les autres. La mention de cette promesse à tenir et le fait de la réaliser nous signale toute l’importance lors de la marche vers l’avenir de faire mémoire de celles et de ceux qui ont permis la poursuite de l’existence du peuple, ici en l’occurrence Joseph, mais il y en a bien d’autres. C’est en s’appuyant sur cette mémoire, en y puisant aussi de la reconnaissance et des forces qu’il sera possible de poursuivre le chemin.

Pour nous aujourd’hui, les questions de la reconnaissance à l’égard de celles et de ceux qui ont été pour nous des témoins vivants de la Foi et celle de notre propre capacité à la transmettre à notre tour sont ainsi posées.


3. Soukkoth

L’arrivée à Soukkoth le premier soir, et le campement dressé, vont prendre une grande place dans la tradition juive une fois la terre promise atteinte. La fête des tentes ou encore fête des cabanes ou des Tabernacles, Soukkoth donc, est célébrée aujourd’hui encore. En Deutéronome 16 au verset 15 nous apprenons qu’elle est appelée « Hag » c’est-à-dire la fête par excellence. Elle est évoquée dans la liturgie notamment comme le temps de « notre joie ». Cette fête rappelle comment l’apprentissage de vivre libre en dépendant entièrement de la miséricorde de Dieu a été difficile.

Encore aujourd’hui, je le crois, la célébration de rites et de fêtes religieuses à caractère collectif ou communautaire est extrêmement importante. D’autant plus que beaucoup de nos contemporains sont en manque de repères et que l’individualisme parfois poussé à l’extrême met à rude épreuve les liens humains dans notre société.


4. La Shékina

Le dernier élément qui nous intéresse dans notre récit d’aujourd’hui est la présence de Dieu durant cette marche vers l’avenir. Dieu se manifeste par une colonne de nuée le jour et une colonne de feu la nuit. C’est sous la conduite de la Shékina, cette présence de Dieu, que le peuple devait trouver son réconfort, sa joie et la confiance nécessaire pour poursuivre la marche envers et contre tous les obstacles qui pouvaient se dresser devant lui.

La Shékina a ceci de particulier : c’est que Dieu s’y manifeste indirectement par le moyen de la nuée et du feu, mais qu’il ne se montre que par ces manifestations. Il reste caché. Lors des cultes ultérieurs, cette présence tout à la fois proche et cachée de Dieu sera symbolisée par des « nuages » d’encens brulés dans le Temple de Jérusalem sur l’autel dit des parfums. Ainsi Dieu, tout en épaulant son peuple et en le conduisant, ne vient pas l’écraser par sa présence. Il se montre fidèle à sa promesse d’accompagner le peuple d’Israël vers la terre ou coulent le lait et le miel tout en se laissant désirer et chercher.


Point d’étape

Pour marcher vers son avenir, le peuple d’Israël est accompagné par un Dieu qui prend soin de lui et le protège, ce peuple est conscient de tout ce qui a déjà été fait pour lui par le passé, soit par des ancêtres dans la foi, soit par Dieu lui-même, faire mémoire de tout cela et transmettre la foi en Dieu sont essentiels. Cette transmission se fait jusqu’à aujourd’hui par des fêtes, des rites religieux et des célébrations comme la fête des cabanes, Soukkoth, en témoigne. Le lien communautaire est ainsi mis en avant. Le récit d’Exode 13 insiste aussi sur la présence fidèle de Dieu qui ne se révèle pas directement, mais marque sa présence indirectement par les colonnes de nuée et de feu. Ce sera dans le second testament que cette présence-absence va évoluer.

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Deuxième partie : Jean 14, 1-6 (Vy Tirman)

Nous quittons notre marche dans le désert et faisons un bond dans le temps. Dieu va continuer à suivre et accompagner son peuple, au fil des générations puis d’une manière inédite : avec la venue de Jésus.

« En ceci, a été manifesté l’amour de Dieu pour nous, c’est que Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par lui. » (1 Jean 4, 9)    

Parler d’avenir ce matin, c’est avoir en mémoire l’intention première de Dieu, qui vient nous rejoindre par amour dans notre pâte humaine. Lui, le Divin, qui nous sépare, il vient parmi nous.

C'est au milieu de ses disciples que Jésus est ce matin. Et nous le retrouvons dans cet évangile de Jean, en train de parler d'avenir avec ses amis. Il s'entretient avec eux comme toutes les fois, mais cette fois, l'heure est grave. Les disciples sont troublés face aux dernières annonces de Jésus. Sa mort est proche et l'un d'eux va le trahir, le livrer.

Drôle de choix que ce passage pour parler d'avenir, car l'horizon des disciples paraît bien sombre. L'occupation romaine est toujours présente et oppressante. Et les autorités religieuses de plus en plus hostiles à Jésus et son cercle. Le choc pour les disciples est d’autant plus rude, alors que quelques jours avant, Jésus était fêté, reconnu et acclamé dans les rues de Jérusalem.

Mais accordons une attention particulière à ces paroles de Jésus : « Que votre cœur ne soit pas bouleversé ! »

Dans nos vies aussi, il y a des situations qui peuvent nous bouleverser, des événements qui peuvent nous inquiéter : les troubles politiques, les bruits de guerre, ici et là, qui viennent remettre en question la stabilité géopolitique du monde, l'impact du dérèglement climatique, comme la sécheresse en Espagne, une maladie récemment diagnostiquée, une rupture ou encore des changements sociétaux profonds, qui nécessitent courage et confiance pour tracer l'avenir, comme pour nos paroisses, le processus EREN 2023 (ndlr, Église réformée de Neuchâtel) et ses questions d'avenir.

Qu'est-ce que l'avenir nous réserve ? Comment préparer l'avenir ? Nous ne sommes jamais aussi concernés par l'avenir que quand le présent est source d'inquiétudes.

« Que votre cœur ne se trouble pas, croyez en Dieu, croyez en moi. »

Hier comme aujourd’hui, Jésus n’est pas étranger à nos vies. Jésus ne va pas abandonner les siens, au contraire Il sera toujours à leur côté, par-delà sa mort, il se laissera reconnaître en chemin comme pour les disciples d'Emmaüs.

Lorsque Jésus leur dit : « Croyez en Dieu et croyez en moi », il leur dit, il nous dit : « Ayez confiance, osez la confiance. Je suis avec vous tous les jours. »

Pour les disciples, tout comme pour nous aujourd'hui, il n'est pas toujours évident de percevoir cette présence de Dieu à nos côtés : cette présence bienveillante qui permet aux croyants d'affirmer que Dieu est Celui qui les a aidés à trouver des chemins bis pour aller de l'avant, qui leur a permis de rester debout, vivant. Et heureux de l'être, malgré les difficultés, malgré notre condition humaine.

Dieu sait comment se rendre présent auprès de chacun de nous, par sa Parole, les Écritures que nous pouvons fréquenter, des signes, des hasards de circonstances, par des retournements de situations. Il nous encourage, mais aussi à travers de conseils avisés, un soutien amical, une communauté fraternelle, une ouverture inopinée, ou au contraire, une porte fermée. Il fait naître une intime conviction, une paix inespérée, un dialogue intérieur, et la vie et la confiance peuvent reprendre.

Mais nous, saurons-nous reconnaître ces signes qui nous invitent à demeurer dans la confiance d'un Dieu qui nous promet sa présence tous les jours ?

Saurons-nous faire certains deuils nécessaires, pour quitter l'Égypte pour le pays promis ?

Saurons-nous faire certains deuils nécessaires pour quitter un chapitre de notre vie, pour en écrire un nouveau ?

Saurons-nous lui laisser assez d'espace dans nos vies, de lâcher prise, pour laisser l'Esprit-Saint agir, non pas sans nous, mais avec nous ?

La mort tragique de Jésus marque une fin, un échec aux yeux du monde et la victoire du mal. Mais la mort de Jésus, dans la perspective de Dieu, dans le dessein de Dieu, ce n'est autre qu'un départ, où Jésus devance ses disciples, où la lumière de Pâques va se lever sur un tombeau vide.

Jésus emprunte l’image de la maison du Père pour dire que Dieu rassemble les siens, et qu’il nous attend chez lui, là où le mal a été vaincu, là où le mal n'a plus de prise sur l'humain, là où les souffrances ne sont plus, là où se trouvent son règne, sa paix, sa délivrance, son salut. Et cette vie de plénitude, pleinement libre, accomplie, commence dès à présent, avec pour horizon, le retour à la maison du Père.

Et à chaque fois que nous cherchons à vivre les valeurs de ce règne, nous faisons nôtre, le chemin, la vérité et la vie dont parle Jésus. Ce règne, cet horizon de plénitude, de paix et de justice vaut la peine que nous poursuivions notre chemin, fermement, avec les forces que Jésus donne.

En conclusion, chers amis, et chers auditeurs, pourquoi ne pas faire confiance à Jésus, à celui qui nous dit de ne pas nous troubler devant nos réalités ? Après tout, les disciples eux-mêmes, face à la mort et aux persécutions, étaient troublés, à raison.

Mais quelque chose a changé chez les disciples… On retrouvera ces mêmes disciples quelques jours après ce discours de Jésus, quelques jours après Pâques, confiants, courageux, audacieux !

Ce n'était pas l'autodétermination qui les a changés, ce n'étaient pas des encouragements mutuels qui les ont convaincus, ce n'était pas de savoir relativiser leur réalité qui leur a fait prendre de la distance.

Jésus est ressuscité !

Parce qu’il vit, je n’ai rien à craindre !
Mes lendemains sont assurés,
Entre ses mains, il tient ma vie,
Pour ce temps et l’éternité, je sais qu’il vit.

Et la réalité, quasi historique de la résurrection de Jésus, c'est aussi encore aujourd'hui – ce qui donne de la crédibilité aux paroles de Jésus :

Que votre cœur ne soit pas bouleversé. Je suis vivant !
Croyez en Dieu, croyez en moi. Je suis vivant !

Amen.

Après l’évènement fondateur qu’a été la libération de l’esclavage en Egypte, nous rejoignons le peuple au tout début de son cheminement vers la terre promise. Pour cette marche vers l’avenir, plusieurs éléments sont à prendre en considération comme ce qui sera fait de la halte à Soukkoth, du pourquoi il fallait se munir des ossements de Joseph ou encore de ce que signifie la nuée qui leur montre le chemin le jour et la colonne de feu qui les dirige la nuit.

Dans la deuxième partie de la prédication, nous découvrons comment l'amour de Dieu a permis aux disciples de reprendre confiance en l'avenir pour poursuivre leur chemin après la mort de leur maître. Comment comprendre ces paroles de Jésus pour avancer avec confiance vers l'avenir?

Détails

Célébration
Avec la participation de
Monique Linder et Laurent Huguenin pour les lectures.
Orgue
Musique
Carolyn Woods au piano. Le choeur des Rameaux, sous la direction d'Olivier Pianaro.