Dieu? même pas peur!

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Écouter le culte :

« Malheur à moi, je suis perdu, mes yeux ont vu le Roi, le Seigneur de l’univers ! »

« Éloigne-toi de moi qui suis un homme pécheur. »

Autant Ésaïe, que Pierre s’exclament ainsi, confronté au divin. Ésaïe et Pierre, huit siècles les séparent, mais la même terreur les réunit : celle de se trouver devant Dieu lui-même, et sa manifestation. Eux, des hommes pécheurs, devant le Saint des Saints. Hommes impurs, homme si petits et vulnérables devant le Saint, le Sacré.

Et nous ? Vingt siècles encore plus tard ?

Pendant longtemps encore cette peur a perduré dans l’histoire occidentale. Peur du jugement dernier, peur d’être perdu à jamais, de brûler dans les flammes de l’enfer. Mais aujourd’hui, cette peur semble avoir disparu. Si le paradis existe, il doit être pour tous. Et même si nous n’y croyons pas, c’est souvent une image de paix et de repos qui est évoquée quand on parle de la mort.

Dieu a-t-il changé ? Avons-nous changé ? Vivons-nous alors aujourd’hui dans la confiance ? Je n’en ai malheureusement pas l’impression. Je crois que, autant qu’avant, et peut-être même plus, nous vivons dans la peur. En effet, dans la peur moyenâgeuse, il y avait certes la peur de l’au-delà, mais aussi des épidémies, des incendies, des naufrages, des brigands, dans un monde rude, sans beaucoup de confort, ni de médicaments. Et peut-être que l’Église a accentué encore l’idée de jugement et de condamnation. Mais le Dieu Tout-Puissant était aussi celui qui pouvait sortir l’homme de ce monde terrible et angoissant.

Aujourd’hui, habitués dans nos latitudes à une vie plus facile, à une aide sociale et un accès aux soins, nous nous étions habitués à moins compter sur Dieu et plus sur le progrès.

Aujourd’hui, nous découvrons à nouveau nos limites. Nous savons que les guerres et les catastrophes nous menacent encore mais nous avons oublié la toute-puissance de Dieu. Et notre terreur est plus grande encore.

De manière très schématique, je dirais qu’autrefois le jugement et le salut venaient de Dieu, et qu’aujourd’hui, dans un monde où Dieu a été mis de côté, jugement et salut nous reviennent, et nous sommes incapables de maîtriser ni l’un, ni l’autre.

Notre jugement est laxiste ou trop sévère, sur les autres, mais aussi sur nous-mêmes. Tous nos actes restent écrits. Encore davantage avec l'internet. Constamment, ils peuvent nous rattraper. On le voit, par exemple chez les hommes ou femmes politiques. Et la caractéristique de ces jugements populaires c’est qu’ils ignorent le pardon.

Or, sans pardon, nous ne pouvons pas espérer. Écrasés de culpabilité, il nous faudrait arriver encore à nous en sortir tout seul ! Nous devrions nous sauver et sauver le monde. Faire nos preuves, faire mieux que les générations d’avant.

Ouf ! Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais je crois que nous nous mettons, sur nous-mêmes et sur nos frères et sœurs, de bien lourds fardeaux. Des fardeaux qui nous écrasent, que nous ne pouvons pas porter, que Dieu seul pourrait nous aider à porter.

Mais quel Dieu ? Un Dieu exigeant, culpabilisant ou alors, un Dieu à l’eau de rose, qui soutient toujours le politiquement correct ? Nous n’avons pas un Dieu marionnette, un Dieu prétexte, une idole à notre disposition. Dieu apparaît là où ne l’attendons pas. Dieu reste le Tout-Autre et le Tout-Puissant, mais il ne faut pas oublier d’ajouter qu’il est aussi le Tout-Miséricordieux, le Tout-Amour, tendresse et pardon.

Oui, le Dieu Tout Puissant n’est pas tant le Dieu des armées que le Dieu qui vient nous rejoindre en Jésus et qui s’agenouille à nos pieds pour les laver. Puissance et faiblesse ne se contredisent pas en lui. C’est les deux ensembles, pleinement l’un et pleinement l’autre, comme Jésus est pleinement homme et pleinement Dieu.

Dieu ne se laisse pas enfermer, mais il vient nous ouvrir, nous appeler, nous éveiller à la liberté de la vie, alors que nous restons souvent seuls dans nos boîtes, enfermés et apeurés. Paradoxalement, plus la crainte de Dieu diminue, plus la peur des hommes augmente !

Retrouver la crainte de Dieu, d’un Dieu que l’on ne maîtrise pas, dans le sens de le respecter et de trouver la juste distance entre lui et nous, c’est retrouver notre place dans l’espace et dans la création.

« La crainte de Dieu est le commencement de la sagesse. »

Le respect de Dieu et non la peur. Le fait de se sentir petits face à quelque chose d'immensément plus grand que nous. À sa juste place, cela éveille en nous un sentiment d’émerveillement et de confiance, comme petits, nous pouvions voir nos parents.

Face à Dieu, cette distance reste toute notre vie, mais l’intimité grandit. La relation à Dieu restera toujours avec sa part de mystère, d’incompréhension de confrontation avec le Tout-Autre, mais notre relation d’amour et de confiance peut nous propulser à aller au-delà de nous-mêmes, à nous surpasser d’une certaine manière en le laissant agir à travers nous.

Les textes d’aujourd’hui :

- Une parole, un appel en mission.
- Un effroi.
- Une réponse : « Me voici » dira Ésaïe. « Sur ta parole je jetterai mon filet » répondra Pierre.

Ils ont su reconnaître le Dieu qui les appelait.

Et nous, quelle est notre réponse ?

Peut-être également une envie, une envie de faire confiance à celui qui nous aime et qui nous appelle à la suivre, et à devenir les témoins de sa grandeur et de son amour.

Amen

Esaïe et Pierre éprouvent cette même terreur devant, Dieu, l’indicible, celui qui leur fait ressortir leur indignité. Terreur qui se reflète dans tant de peintures et de bas-relief et qui témoignent de cette terreur dans l’histoire des hommes. Mais aujourd’hui, qu’en est-il ? Entre la colère, l’indifférence ou le copinage, quelle distance mettons-nous entre Dieu et nous ? Est-ce vraiment une meilleure distance qu’au temps d’Esaïe ?

Détails

Avec la participation de
Marika et Yves Girardin, Sylvia Autran
Orgue
Nicoud, Jean-Claude
Musique
Le groupe Dilem, avec Hekmat Homsi, Nicolas Fellrath, Romain Michaud, Léa Buceck, Boris Salzmann et Christine Salzmann