Ambassadeurs de réconciliation

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Aujourd’hui nous fêtons les 70 ans d’un bébé improbable ! Un bébé qui n’avait aucune chance de naître, parce que ses parents étaient profondément désunis, même ennemis ! Et pourtant, ce bébé ne fut pas un accident, mais il était ardemment désiré.
Ce bébé, c’est l’Institut œcuménique de Bossey. Il est né en 1946, dans le traumatisme et les violences de la Seconde Guerre mondiale – comme un fruit improbable au milieu des ruines et des tragédies humaines. Le monde sortait de la folie et de la barbarie, se partageait en vainqueurs et en perdants. Et logiquement, c’est l’esprit de revanche et de vengeance qui devait l’emporter. Etait-ce pensable que des chrétiens de pays ennemis puissent partager quelque chose ?

Mais il y a eu une première surprise, une surprise divine ! Dans un sursaut partagé, les Eglises ont dit ensemble « Plus jamais la guerre ». Elles ont compris qu’elles avaient une responsabilité particulière pour réconcilier les peuples au-delà de toutes les frontières. Les grands corps œcuméniques, comme le Conseil œcuménique des Eglises, l’Institut œcuménique de Bossey et d’autres organismes mondiaux sont nés comme des fruits improbables conçus entre des peuples ennemis !
Elles n’ont pas toujours réussi, mais mesurons l’incroyable : les chrétiens ont décidé qu’ils se tiendraient ensemble au-delà des frontières politiques et culturelles, pour que triomphe la réconciliation. Bossey est devenu en 70 ans un laboratoire international de réconciliation, de formation et d’apprentissage de vie, entre des croyants d’Eglises qui ne sont pas unies et qui pourtant s’appliquent à faire triompher le dialogue.
Comment est-ce possible ? L’apôtre Paul dit avec vigueur : « L’amour du Christ nous étreint » ! Il y a une force plus impérieuse que toutes les divisions : comme lorsqu’on fait l’expérience de l’amour, cet amour déborde, et ne se laisse pas intimider par les contraintes sociales.

J’aimerais pouvoir dire aujourd’hui : cette surprise divine, cette poussée de l’Esprit saint a été si contagieuse que les tragédies des guerres ne sont plus que des cauchemars de la nuit du passé. Mais, 70 ans après, le monde est à nouveau à feu et à sang et nous assistons impuissants à de nouvelles barbaries, à un terrorisme fratricide, à une déshumanisation profonde.

Un fléau nous met à genoux : la peur. Et une peur plus vive que jamais. Car dans les guerres, chaque peuple pouvait identifier le mauvais chez « l’autre » peuple. Aujourd’hui, notre peur devient angoisse profonde, car le mal n’est plus localisable, l’ennemi peut être n’importe qui, au plus près de chez nous. La contagion se propage, comme un mal larvé et efficace.
Que peuvent dire les croyants quand hurlent les loups ? et quand certains loups prennent même le nom de Dieu pour diviser et imposer la terreur?
Ce que toute personne peut apporter, là où elle se trouve et de toutes les manières, c’est la parole de réconciliation, qui résiste au diktat de la peur. C’est là le sens de la vie croyante. Ce n’est pas une option, mais le cœur de la foi – ceux qui ont bénéficié de la réconciliation en Jésus-Christ sont dans la nécessité de la partager !
Les raisonnables vont protester et dire : c’est trop risqué, ces croyants ne sont que des naïfs. Le réalisme demande qu’on se méfie, qu’on reste entre nous. Cette crainte n’est pas seulement face à l’islam, confondu avec l’islamisme, mais même dans le dialogue oecuménique. Ceux qui sont engagés dans l’œcuménisme sont accusés jusque dans leurs propres Eglises de pactiser avec les faux croyants, de trahir la vraie foi. Et dans les lieux de vie ou de travail, ceux qui font la paix entre les coqs qui s’affrontent sont souvent méprisés comme des faibles…
Pourtant, l’apôtre Paul, l’ambassadeur de la réconciliation, n’avait rien d’un faible naïf ! Lui qui était si sûr d’être un pur, un excellent croyant était justement devenu un persécuteur inhumain ! C’est la révélation incroyable de Jésus-Christ comme Messie qui l’a mis sur le chemin inverse de celui qu’il pensait juste. Le violent est devenu l’ambassadeur de la réconciliation ! Un ambassadeur improbable d’un Dieu qui n’était pas celui qui frappe mais qui veut réconcilier.

Ce serait bien plus sûr d’avoir un Dieu qui frappe ! Il m’arrive de souhaiter que sa puissance puisse aussi renverser la haine, transformer le fléau de la peur et faire déposer les armes. Il le pourrait, pourquoi ne le fait-il pas ? C’est là une autre surprise de Dieu : il ne donne pas la réponse que je souhaiterais. Il ne nous corrige pas en nous frappant, comme le voudraient des barbares qui font la guerre au nom de Dieu. Ce Dieu qui est grand n’agit pas par la force ! Il supplie : « Au nom du Christ, nous vous en supplions » !
Une plus grande surprise de Dieu est encore dans le renversement qui suit : « Nous vous en supplions, laissez-vous réconcilier avec Dieu ». Il ne dit pas « allez évangéliser », « allez convertir les autres », « allez apporter la réconciliation aux gens » !
Non, au contraire : Dieu supplie laissez-VOUS réconcilier ! La réconciliation c’est d’abord en nous-mêmes, dans notre cœur, c’est d’abord notre guérison intérieure contre la colère, contre l’esprit de vengeance, contre l’égocentrisme, contre l’angoisse. C’est d’abord le combat que Dieu mène, non pas contre les autres, mais pour notre propre transformation intérieure ! Être chrétien, et cela vaut pour chaque personne, c’est d’abord laisser agir Dieu en nous pour faire de nous sa « nouvelle création » que promet l’apôtre. « Si quelqu’un est en Christ, il est une nouvelle créature. » Le bébé improbable, le fruit inimaginable au milieu du monde qui hurle, c’est la personne qui ne vit pas recroquevillée sur elle-même, mais abritée en Dieu et tournée vers les autres comme vers ses frères et sœurs, au cœur des divisons encore réelles.

Le bébé qu’est la nouvelle création voulue par Dieu, en chacun(e) de nous, à Bossey et dans tous les lieux de réconciliation, est encore un fruit fragile, sans grande défense. Et il nous faut continuer à notre tour à supplier le Seigneur qu’il nous accorde son Esprit pour que la nouvelle création grandisse.
La réconciliation doit encore grandir, elle doit s’étendre, être contagieuse. Le mouvement œcuménique, qui a presque un siècle, n’a pas encore atteint son but. Plus que jamais, les dialogues, mais aussi les expériences de formation et de vie commune entre différentes cultures doivent se multiplier. Ce sont les laboratoires où sera cultivée la vie des générations à venir. Nous avons un besoin urgent de toutes les fleurs de réconciliation qui poussent difficilement au milieu de la peur.
Et il y a encore une promesse dans la supplique de l’apôtre : encore une surprise de Dieu, un autre renversement. Jésus-Christ a échangé sa place avec nous, dit l’apôtre : Dieu lui a fait endosser le péché de violence et de mort de l’humanité, pour que nous devenions « justice de Dieu » ! Nous sommes responsables de la nouvelle création, qui se bâtit sur la justice. Notre parole de croyant(e)s doit résister aux idées fausses, à l’esprit de division, aux injustices, à tout ce qui déshumanise et abêtit.
Nous n’avons pas grand pouvoir, mais nous avons notre faible parole, notre engagement en tant que chrétiens d’une vaste famille dans le monde entier. Nous recevrons la force pour oser, dans tout ce que nous faisons, la rencontre de l’autre, la confiance, la réconciliation, en nous-mêmes, avec Dieu et ainsi avec autrui.

Cela fait 70 ans que le beau bébé de la réconciliation grandit au cœur de l’Institut œcuménique de Bossey, comme dans de nombreux lieux de dialogue entre Eglises, et aussi entre religions. Personne ne pourra arrêter la nouvelle création que Dieu a déjà initiée. Ce beau fruit pousse et chacun(e) de nous peut contribuer à l’arroser, autant que le Seigneur nous en accorde le temps. 70 ans pour le fruit de Bossey, comme beaucoup d’organismes œcuméniques, mais « c’est aujourd’hui le jour du salut ». La nouvelle création, cela commence aujourd’hui.

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Dimanche 2 octobre, l’Institut oecuménique de Bossey, accueille une célébration œcuménique dans le cadre des festivités du 70e anniversaire de l’existence de sa formation œcuménique.

Depuis 1946, l’Institut oecuménique accueille des étudiants et des chercheurs du monde entier dans la campagne vaudoise aux portes de Genève, pour leur offrir une formation universitaire oecuménique et une expérience de vie communautaire. Devenu une large plate-forme de formation et d’échanges multiculturels au sein du christianisme, l’Institut de Bossey, est un centre de compétences reconnu, rattaché au Conseil oecuménique des Églises (COE). Situé au cœur du vignoble de « Terre-sainte » à Bogis-Bossey, le château de Bossey a accueilli au fil des décennies des centaines d’étudiants, pasteur-es ou laïques, passionnés par le dialogue et la réflexion œcuménique. Chaque année, plus de 40 étudiants de toutes dénominations chrétiennes et du monde entier y suivent un cursus universitaire reconnu par l’Université de Genève.Les productions « Messe » et « Culte » cèdent la place à deux heures d’émission depuis l’Institut œcuménique de Bossey. Présentée en direct du Château de Bossey par Évelyne Oberson et Sabine Pétermann, cette émission débutera par une heure de magazine pour découvrir les lieux et l’histoire de cet Institut. Elle sera suivie d’une heure de célébration œcuménique animée par les étudiants et les enseignants de l’Institut œcuménique de Bossey.
Une production Médias-pro & Cath-Info en partenariat avec RTS Espace 2.
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De 9h à 10h : Reportages et interviews
Evelyne Oberson propose de découvrir l’actualité et l’histoire de l’Institut oecuménique de Bossey. Avec Ioan Sauca, directeur de l’Institut oecuménique de Bossey, Hans Ruedi Weber, pasteur et ancien directeur de l’Institut de Bossey, Sabrina Slater, Vitalii Horzov et John Karmakar étudiants.

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De 10h à 11h : Célébration œcuménique
Prédication : Prof. Elisabeth Gangloff-Parmentier
Présidence et liturgie : Dagmar Heller, Ester Widiasih, Terry MacArthur, Lawrence Iwuamadi et Ioan Sauca.
Avec la participation liturgique et musicale des étudiants et des enseignants de l’Institut oecuménique de Bossey.

Détails

Avec la participation de
Rev. Dr. Dagmar Heller, Rev.Dr. Ioan Sauca, Rev. Ester Widiasih, Rev. Terry MacArthur, Rev. Dr. Lawrence Iwuamadi
Orgue
Musique