Le pardon, une réalité divine offerte à l’homme

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Il y a des situations qui ne peuvent être qu’explosives ne serait-ce qu’à cause des éléments en présence. Et il en fut ainsi, ce jour-là, dans la maison de Simon le pharisien. Imaginez la scène : d’un côté, une assemblée de gens pieux qui se veulent purs et sans compromission en se séparant de tout ce qui pourrait les souiller et d’un autre côté une femme aux mœurs légères connue de tous. Sa présence est totalement impensable dans une telle assemblée et l’on peut vraiment se demander ce qu’elle fait là !
Oui, tout est anachronique et incompréhensible sans la présence de Jésus, qui fait comme un trait d’union entre ces deux mondes totalement étrangers l’un à l’autre. D’un côté nous avons le monde de la religion scrupuleuse et moralisante et de l’autre, le monde du laxisme et de l’immoralité.
Dans quel camp se trouve donc Jésus ? Pourquoi ne prend-il pas parti pour les uns contre les autres ? Pourquoi laisse-t-il donc cette femme faire cette démonstration de tendresse à la limite de la décence et devant un tel public ?

Pour comprendre ce qui se passe et ce que Jésus veut faire découvrir aux pharisiens d’alors, tout comme à nous aujourd’hui, il faut partir, non pas de l’événement, mais bien de la parabole qui doit éclairer la situation. L’erreur serait en effet de vouloir blanchir les uns artificiellement en faisant de cette femme une autre personne que ce qu’elle est ou de lui trouver des excuses ou de bonnes raisons d’être ainsi. Ou au contraire de noircir les autres en faisant de Simon un tartuffe religieux pas aussi pur que ce qu’il veut le dire ou le montrer.
Non, la seule explication à trouver nous est donnée par Jésus lui-même, au travers de la parabole des deux débiteurs qu’il va raconter à Simon. L’un doit 500 pièces d’argent à son prêteur, l’autre n’en doit que 50. Cependant, aux deux, la dette est remise. Qui sera alors le plus reconnaissant ?
La réponse est évidente, et Simon ne s’y trompe pas : c’est celui à qui on a remis la dette la plus grande ! répond-il à Jésus. Et bien, lui dit Jésus, il en est de même avec cette femme. Autrement dit, sa dette qui semble être si grande, lui est remise. Et, aux pieds de Jésus elle vit et manifeste le temps de la reconnaissance et du remerciement. Délivrée et libérée du poids de sa faute, elle exprime sa joie et son bonheur d’être redevenue vivante, acceptée et acceptable de nouveau par les autres. Ses démonstrations de tendresse envers Jésus ne sont que les signes et les gestes qu’elle a su inventer pour exprimer tout cela. Et Simon ne peut les comprendre et les accepter, car il n’a pas découvert la joie et le bonheur d’être pardonné.
Cette femme est comme une personne malade ou handicapée qui traîne son infirmité sans trouver de guérison. Et puis voilà qu’un jour, elle est débarrassée de tout cela, remise à neuf, vivante à nouveau avec toutes ses possibilités retrouvées. Comment alors ne pas exprimer sa reconnaissance et manifester sa joie ?
Ainsi en est-il pour celui qui a découvert l’importance du pardon. Le passé n’a plus sa lourdeur et ne l’empêche plus de vivre pleinement aujourd’hui. C’est comme une nouvelle naissance qui a eu lieu où tout est à nouveau net et propre. Nous avons souvent tendance à vouloir nous souvenir de ce qui a été et ce souvenir se transforme parfois en jugement persistant.
C’est ce qui se passe ici pour Simon le pharisien qui ne peut imaginer que cette femme soit devenue autre et différente. Aux yeux de Simon, elle reste ce qu’elle a été, la dette n’est pas remise et cette femme ne peut donc que souiller Jésus par sa présence.
Remarquez bien qu’il n’est pas le seul à ne pas accepter le pardon. Souvenez-vous du fils aîné de la parabole du fils prodigue. Lui aussi ne peut accepter le retour de son frère et refuse de se réjouir et de se joindre au festin organisé par le père. Pour lui aussi cette fête est scandaleuse. Et en effet, pour qui n’y aurait-il pas ici matière à revendiquer ? Allons-nous rire de Simon ou encore du frère aîné ?
Non, car nous savons bien que tous nous pourrions, en pareille situation, raisonner comme eux, à partir des concepts humains pour lesquels toute faute doit être punie, et avec encore et toujours la certitude qu’il faut payer pour réparer le passé. On est ici dans une comptabilité humaine de fautes et de punitions alors que Jésus parle de pardon et de libération.

Bien sûr, il s’agit ici de réalité divine et le pardon c’est d’abord et surtout l’œuvre de Dieu. Mais par-delà son caractère divin, le pardon est aussi une exigence que Jésus nous demande de vivre. Ne nous rappelle-t-il pas dans chaque Notre Père que nous sommes pardonnés comme nous aussi nous pardonnons ?
Le problème de Simon le pharisien tout comme du fils aîné, c’est qu’ils n’ont pas l’impression d’avoir besoin de pardon. N’en va-t-il pas de même parfois pour nous ? Nous n’avons rien de grave à nous reprocher aussi pouvons-nous vivre sans pardon ni à recevoir, ni à donner !
Parce que nous pourrions nous croire sans faute, nous n’attendons pas de sauveur. Nous sommes à l’image de Simon lorsque nous perdons le sentiment d’être des êtres limités et faibles. Ne regardant plus assez Jésus comme notre sauveur, nos rendez-vous avec lui risquent de rester à la surface de notre vie et à la surface de son pardon.
Comment s’étonner alors que notre amour pour Dieu soit si faible et si timide ? Il est à l’exemple de l’accueil fait à Jésus par Simon le pharisien : poli, mais réduit au minimum. Et c’est souvent là la place qu’occupe Dieu dans nos vies, car nous n’avons pas découvert à quel point lui nous aime, à quel point il veut nous pardonner et nous combler de bien.

Nous parvenons assez bien à nous représenter l’accueil de Jésus par Simon, plein de décence et de mesure. C’est l’accueil que l’homme fait à Dieu. Ce que le texte nous invite aujourd’hui à découvrir c’est l’accueil de la femme par Jésus. Cet accueil-là est celui que Dieu fait à l’homme qui se repent et revient vers lui. Cet accueil-là est sans aucune mesure avec l’accueil humain. Il est toujours décrit comme joie et fête; que ce soit pour le fils retrouvé, la brebis retrouvée ou encore la pièce d’argent retrouvée.
Vous êtes-vous sentis un jour fêtés par Dieu parce que revenus chez lui ? C’est peut-être cette expérience-là qu’il faut faire pour comprendre ce que peut être la reconnaissance et l’amour en retour. Celui ou celle à qui on pardonne peu montre peu d’amour dit Jésus. Celui qui aime le plus est celui à qui l’on a pardonné d’avantage. C’est peut-être la phrase clé qui permet de comprendre celle-ci : « Ainsi je te déclare que ses péchés si nombreux ont été pardonnés. C’est pourquoi elle a montré beaucoup d’amour.»
Chers amis, que Dieu nous aide à découvrir la richesse de son amour et la force de son pardon pour que nos cœurs aussi débordent de reconnaissance.

Amen !

Détails

Avec la participation de
Orgue
Claude Pahud
Musique
Choeur paroissial (env. 50 p.), direction Olivier Pianaro