Une Parole à lire, des hiéroglyphes aux SMS…

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Écouter le culte :

Je dois avouer mon souci quand on m’a proposé la méditation de ce dernier culte axé sur la Réforme et plus particulièrement sur la Parole et les Ecritures – moi diacre, qui ai donc le ministère du service et non celui de la Parole.
Très vite, ce souci a disparu, la Parole est à tous, pour tous, elle était au commencement. On m’a appris à respecter la Bible, vraiment comme un livre à part, puisque Saint. La Bible qui doit avoir sa propre place et si on ne sait où la mettre, jamais elle ne sera placée sous la pile, elle doit rester accessible. On ne pose RIEN sur une Bible, peut-être juste des lunettes! J’ignore si c’est encore d’actualité, mais chez nous, c’est respecté.

Les Bibles, elles occupent une place à part dans notre bibliothèque, elles sont même à l’abri dans une vitrine: Bibles de différentes traductions, de différentes provenances, mais souvent consultées et sorties de leurs rayons.
Celle de Jérusalem, la Chouraky, la TOB, la Synodale, la Segond et souvenir de mon catéchisme, l’Osterwald, pour moi plus précieuse que les autres, car c’est elle qui m’a ouvert tant de fenêtres, depuis le jour bien lointain où ma tante me l’a offerte, en disant, « Tiens, prends-la. Avec toi, elle sera entre de bonnes mains. »
J’avais 16 ans et sur le moment, je n’ai pas compris l’allusion. C’est bien plus tard qu’elle m’a parlée, invitée et accompagnée dans la vie et la formation d’infirmière avec les diaconesses de Saint-Loup, puis dans le quotidien et en formation diaconale, cette Bible de mariage de mes grands-parents maternels, décédés tous les deux.
Sur ses premières pages on peut suivre toute leur vie et celles de leurs descendances, les moments heureux, les grands chagrins, les lignes sinueuses de la fin, elle descend, elle remplit la page, l’écriture de grand-maman aveugle qui avait noté, « Le plus grand chagrin de ma vie, la mort de mon cher compagnon de 65 ans de partage. »
Elle m’est doublement précieuse, cette Bible-là, Ecriture divine et Ecriture humaine, et dedans, de multiples petits papiers, fragiles et jaunis, des versets, des pensées, des avis de décès, des articles de journaux. Des amis m’ont raconté avoir trouvé dans une Bible de famille, les lambeaux de papiers argentés, utilisés durant la guerre pour brouiller les ondes.
Je suis certaine que vous serez nombreux à les retrouver dans vos mémoires, ces signes lointains et évidents que quelque chose de mystérieux et éternel peut guider nos vies, ces témoins mis à l’abri dans une Bible. Vous voyez ou vous devez imaginer cette pile-là.

Un carton de Bibles trouvé sur les escaliers de la maison de paroisse de Saxon, quelqu’un qui ne voulait pas les garder, mais qui ne voulait pas non plus les jeter, nous les avons appelées « les Bibles en marche » et bien sûr, je les ai prises !
Des Bibles de mariage, j’en ai de nombreuses.
A la maison de retraite du Petit Saconnex où nous avons travaillé des années, plusieurs m’ont été confiées, « prenez-la, Isabelle, je ne voudrais pas qu’après moi, elle soit jetée ! ».
C’est dans l’une d’elles qu’ont été faites les lectures ce matin et avec elle aussi que j’ai travaillé cette méditation, sur la terrasse du mayen valaisan, comme dans la chanson, « loin des hommes et près de Dieu », sans internet, uniquement dans le murmure des Ecritures, celui des oiseaux, du vent dans les mélèzes ou juste parfois distraite par le vol des aigles, celui qui voit tout de haut, lui le symbole de L’évangéliste Jean. Lui qui, selon Ezéchiel fonçait vers le soleil, qu’il regardait en face en plein midi, puis plongeait dans l’eau. On dit aussi que même s’il a faim, il laisse toujours une partie de son repas pour les autres. Générosité, amour, élévation vers Dieu, l’eau, la lumière, le partage… quelle chance de pouvoir regarder et rêvasser avec un couple d’aigles.

Des Bibles, j’en ai un peu partout, petits formats dans mes sacs ou de secours dans la voiture. Lorsque je travaillais comme infirmière, j’en avais une en Français courant dans la poche de ma blouse, offerte par une amie et très souvent, on me demandait de venir avec ce que mes collègues appelaient, « mon matériel ». Oui, j’ai eu la chance de travailler dans un lieu où l’Ecriture avait sa place dans les moments difficiles.

Chaque fois que je suis partie en Egypte, c’était avec deux valises, dont une pleine de Bibles. Et jamais, je n’ai eu peur de passer la douane au Caire. Ces Ecritures-là n’étaient pas une fantaisie de ma part, mais la réponse à une réelle demande, « s’il-te-plaît, apporte-nous des Bibles, que chaque membre de la paroisse puisse avoir la sienne, que l’on puisse en offrir aux jeunes du caté… », et s’il faut les faire venir de la Suisse, ce n’est pas par crainte du Coran mais parce que là-bas, un livre coute cher.

La Bible, l’Ecriture qui vient de si loin, si loin que la sagesse des anciens Egyptiens, l’avait pressentie, la voix du Dieu unique, qui encourage, qui bénit. On la trouve déjà gravée à jamais dans le roc des sarcophages, des pyramides. Et mes racines chrétiennes, c’est là-bas sous les rayons de Râ, sur les bords du Nil, sur les colonnes de Louxor que je les ai trouvées et que j’ai réalisé que ma religion, elle ne peut être que vraie, puisqu’elle vient de si loin.
La preuve, la croix copte, que l’on trouve partout, gravée depuis des siècles, elle n’est autre que le Ankh que Pharaon a toujours à la main, la clé qui lui permettra d’accéder à l’au-delà, d’ouvrir les portes de l’immortalité, car de la mort, il n’avait pas peur. Il savait et transmettait qu’elle serait vaincue et n’aurait jamais le dessus.

Bien sûr, ce n’est pas le livre laissé sur notre propre table de nuit, dans les tiroirs des hôtels, ou au fond d’un sac, qui fera fuir le mal, mais l’Ecriture divine, cachée, activée par l’Esprit, parlée, écoutée au bon moment. Jean nous a rappelé que Jésus a dit, « les paroles que je vous dis, sont esprit et elles sont vie ».
L’Ecriture ne va pas pouvoir nous rendre libres et heureux par magie. C’est celle que nous déciderons de connaître, de mettre en pratique, de partager, qui va nous délivrer; fabuleux message transmis au peuple par les réformateurs, eux qui ont permis qu’elle devienne pour tous, grâce à l’imprimerie et à l’abandon du latin réservé au clergé, le Livre Saint mais aussi celui dans lequel on apprenait à lire, donc à écrire. Alors doublement sauvé par l’Ecriture, le monde !

Moise l’a reçue en montant sur le mont Sinaï. Dans l'ancien Orient, lors d'une alliance entre deux puissances, on disposait, dans le temple des partenaires, un document écrit devant être lu périodiquement. Il n'est donc pas surprenant que les Tables de la Loi soient le témoignage concret de l'Alliance entre Dieu et son peuple. C'est la raison pour laquelle les images des tables sont souvent présentes sur le fronton des synagogues.
Pour revenir à Moise, Le peuple d'Israël avait quitté l'Égypte, pays devenu infernal pour lui, pays qui cependant avait été terre d’accueil et de refuge pour Joseph et Marie. Dans le désert du Sinaï, Dieu décide de sceller une alliance entre lui et Moïse qui en sera l'intermédiaire. L’Eternel énonce dix Paroles et les développe. Moïse écrit toutes ces paroles prononcées par Dieu mais celui-ci lui promet des tables de pierre, solides, indestructibles, rappelant la loi et le commandement que le peuple d'Israël devra garder dans un coffre (arche de l'Alliance) qui sera posé sur une table et installé dans une tente. Ces instructions prennent 40 jours, à l'issue desquels Dieu donne à Moïse les Tables de la Charte, écrites de la main de Dieu ».

Dans les temples protestants, une représentation des Tables de la Loi remplaçait, jusqu'au XVIIe siècle, la croix des églises catholiques. Suite à la Réforme, peu de décoration dans nos édifices, des fleurs et toujours, toujours, une Bible. En général, une ancienne, lourde et peu pratique, elle ne sort jamais de son présentoir, mais si je passe par là, rien ne prendra sa place et jamais, jamais elle ne sera posée directement par terre !

La Bible, la Parole, l’Ecriture, pas uniquement la loi, mais l’amour, l’espoir, le pardon. Tous les protestants se reconnaissent, voire se définissent par l'affirmation que seule la foi sauve, par la Sola Scriptura, l'Écriture seule.
Ces multiples réflexions m’ont menée à une étonnante constatation. L’Ecriture, quelle évolution, on ne se demande pas comment notre écriture actuelle, nos messages internet, par exemple, partent. C’est comme s’ils disparaissaient, un clic sur un clavier et hop. Non seulement, c’est parti, mais c’est arrivé, cela ne s’est pas perdu dans les nuages, les océans, les rues, les sommets, rien n’a arrêté nos pensées, nos partages de joie ou de colère, nos écrits se promènent, droit au but, partagés, lus, sauvegardés ou effacés, mais hors de notre volonté.
Et cela me mène à un souvenir récent, lors d’un culte de baptême, j’ai vu avec stupeur, une future catéchumène butter sur son verset biblique. En toute discrétion, son frère est venu à son secours et lui a tendu… l’écran d’un téléphone portable!

Grandeur de cette Ecriture que rien n’arrête. Le prophète Ezéchiel nous le rappelle, incroyable comme il est actuel, lui qui a écrit tant de fois, « la Parole de Dieu me fut encore adressée ». Ainsi, il renforce notre croyance, ce que l’Eternel a dit, s’accomplira.
Parole donnée, parole reçue, parole tenue – c’est notre responsabilité. Et comme nous avons, de nos jours, tous et toutes un téléphone, alors à nous aussi, la Parole de Dieu nous sera toujours adressée, partout et toujours, à tout instant.

Ne nous reste qu’à la lire et la mettre en pratique et peut être bien aussi que je vais changer d’attitude et ne plus être choquée de voir les lectures bibliques se faire sur une feuille de papier. Rien ne passe, rien ne casse, rien ne lasse!

ALLELUIA, AMEN !

La Bible, le livre plus traduit, le plus édité au monde. Des Ecritures mises à la portée de tous, un message vieux comme le monde et pourtant si actuel. De quelle manière traverse-t-il nos vies?

Détails

Avec la participation de
Raymond Minger et Charly Rieder
Orgue
Marie-Marguerite Carron
Musique