Notre vie est-elle écrite à l'avance?

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Écouter le culte :

Durant des siècles, chers amis, vous le savez comme moi, il était plus ou moins admis que le destin de chaque humain était inscrit, écrit à l'avance. Il fallait s'y soumettre et quoiqu'il puisse nous arriver, que ce soit un événement heureux : une rencontre amoureuse, une victoire à la guerre, la venue d'un enfant, la guérison d'une maladie. Quoi qu'il puisse nous arriver d'heureux. C'était mis au compte de Dieu qui avait béni.
Et quand il arrivait un événement plus funeste : une maladie, le décès d'un être proche, une défaite ou une simple contrariété. Quoiqu'il puisse nous arriver de douloureux, cela était aussi mis en rapport avec la volonté divine. Qui d'entre nous ne se souvient pas d'avoir entendu durant son enfance ou peut-être même de l'avoir soi-même répété à ses enfants, lors d'une chute ou d'un accident bénin: c'est le bon Dieu qui t'a puni, c'est Dieu qui l'a voulu. C'était toujours au compte de Dieu, tout puissant souverain de nos vies.

Cette répétition pendant des siècles a eu des conséquences sur l'être humain qui n'avait que deux choix : soit se révolter contre ce destin écrit à l'avance, même si cette révolte était vaine et désespérée. Puisque si Dieu était le maitre tout puissant, alors toute révolte était sans issue. Soit la résignation, plus ou moins acceptée devant l'inéluctable.
Une autre conséquence de cette manière de voir était une stabilité sociale légitimée, que tu sois né pauvre ou riche c'est que Dieu l'avait voulu et il ne sert à rien de se battre pour plus de justice. La religion dans ce cas c'était l'art de se résigner ou dans le meilleur des cas, l'art de voir comment on pouvait influencer favorablement Dieu, par mes prières et mes bonnes actions.
Quant à Dieu, il était enfermé dans l'image de Dieu dans une figure de grand marionnettiste qui tirait les ficelles de nos vies. Figure tutélaire parfois bienveillante, parfois inquiétante, mais en tous les cas agissante

Aujourd'hui, dans nos sociétés occidentales post modernes, la tendance s'est complètement inversée: le destin de chaque humain est entièrement placé entre ses mains ! Sur moi repose la pression de savoir ce que devient ma vie. Quand je réussis c'est grâce à mes qualités ou tout au moins grâce aux faiblesses des autres. La vie est devenue une compétition dont il ne dépend finalement que de moi que je devienne vainqueur. Si je suis malade aussi, c'est de ma faute, de mon hygiène de vie, de mon mental, de mes gènes ou que sais-je encore !
Je deviens hyper responsable de moi. Avec comme conséquences : l'écrasement de l'humain sous le poids de sa propre responsabilité, l'atomisation de nos vies par la pression des multiples compétitions où je suis engagé.
La religion traditionnelle disparaît pour laisser la place à une religion du corps, de la compétition. Une religion de l'évanescence de Dieu aux marges mêmes d'une possibilité d'action. Qui d'entre nous, au bénéfice d'une promotion professionnelle, dirait : c'est Dieu qui l'a fait ? Non, nous dirions : j'ai réussi et c'est tout.
Du coup, Dieu est réduit à quelque chose. La religion traditionnelle populaire n'est plus vraiment le christianisme, mais le quelquechosisme. Pourquoi ? Peut-être justement parce qu'on ne sait plus comment et pourquoi Dieu pourrait agir ?

Alors en fin de compte, en considérant ces deux extrêmes certes un peu caricaturaux qu'en est-il ? Ma vie est-elle écrite à l'avance ? Ou alors suis entièrement et tout seul responsable de ma vie ? Et dans tout cela : quelle place tient Dieu dans mes choix et dans ce qui m'arrive ?
L'histoire d'Abraham, de Sara et d'Agar est éclairante à ce sujet. Il vaut la peine de s'y intéresser. Car derrière leur histoire, il se pourrait bien que ce soit mon histoire aujourd'hui que la Bible raconte.
Au départ, Dieu a un projet, il a l'initiative, il agit sur la destinée d'Abraham et celui-ci y adhère. Mais ce projet semble en échec (il n'a pas de fils et donc une des promesses de Dieu ne se réalise pas). C'est alors que Sara intervient pour concrétiser ce projet, c'est la naissance d'Ismaël. Dieu (tout au moins par son silence) semble valider ce choix.
Puis Dieu intervient pour concrétiser ce projet et voilà que Sarah accouche d'Isaac. Mais ce projet semble à nouveau en péril (il y a 2 fils, lequel est l'héritier de la promesse ?). Sarah intervient à nouveau pour le rectifier ! C'est notre épisode où Dieu intervient à nouveau pour d'une part valider l'intervention de Sarah, mais aussi pour maintenir sa bénédiction sur Ismaël pour lequel il y aura aussi un destin béni.
Dans toute la saga d'Abraham, il y a un jeu incessant entre les décisions humaines et les interventions divines. Je note encore que Dieu n'intervient que par sa parole. Tout ce que la saga nous dit de Dieu, c'est qu'il parle aux uns et aux autres. Comme au jour de la création du monde, il parle. Et ce sont les humains qui traduisent cette parole en actes pour le meilleur ou pour le pire. C'est quand l'humain écoute la Parole et la traduit en actes que cette Parole devient action concrète. Voyez les exemples d'Abraham et d'Agar. C'est parce que cette dernière a accueilli la parole au fond de son désespoir, qu'elle s'est levée que cette parole est devenue agissante dans sa vie.

Qu’en retenir ? Dieu accompagne nos décisions humaines pour réaliser son projet. Le projet de Dieu ne supprime pas notre liberté humaine. Il y a partenariat, une alliance et des interactions mutuelles entre l'agir divin et l'agir humain.
Une métaphore pour expliquer cela : celle du jeu de cartes. Dieu nous prend comme partenaire dans un jeu de cartes. Il a distribué les cartes. Nous en avons en main, il en a aussi. Et au fur et à mesure de notre vie, nous abattons des cartes, Dieu abat les siennes. Nous jouons pour le plaisir d'être ensemble et pour ce plaisir Dieu a un projet pour nous et dans ce projet il nous invite à jouer nos cartes. Mais avec une grande différence : car Dieu lui joue pour que nous gagnions.

Amen !

Détails

Avec la participation de
Rose-Marie Aeschlimann
Orgue
Romaine Zorn Métrailler
Musique
Chœurs mixtes : « Espérance de Randogne » et « Sainte Hymnemode » sous la direction de Romaine Zorn Métrailler et de Chantal Ruedaz