L'Esprit dans les épîtres

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L'Esprit ne cesse dans les Ecritures d'indiquer la manière dont Dieu est présent en ce monde. En ce sens, nous sommes aujourd'hui encore dans le temps de l'Esprit puisque Dieu nous parle toujours par sa Parole.

Or, en songeant à ce passage des Ecritures lu précédemment et au temps que nous vivons actuellement, il me vient une image. A quoi servirait une montre de poche fabriquée à l'ancienne, une de ces montre oignon, si elle ne possédait plus ses trois aiguilles caractéristiques qui ponctuent le temps en secondes, en minutes et en heures? Certes, la montre serait magnifique avec l'indication de ses heures peintes en beaux chiffres romains sur le cadran nacré, lui donnant de la sorte un air à la fois ancien et quelque peu noble. Imaginez quel plaisir il y aurait alors de la tenir calée dans le creux de sa main, son cadran bien visible. Quelle impression de minuscule mécanique de précision maîtrisée à souhait au moment de tourner entre pouce et index le remontoir. On y entendrait les cliquetis des rouages qui s'entreglissent harmonieusement les uns dans les autres pour entraîner petit à petit l'ensemble du mécanisme dans un seul mouvement qui rythme ainsi le temps qui passe… clic, clic, clic.

Alors quel dommage si les trois aiguilles venaient à faire défaut à une telle montre. Finalement, il lui manquerait, à cette montre-là, l'essentiel de ce qui justifie tout l'art de ce travail précis et harmonieux: indiquer à son propriétaire l'heure qu'il est au moment de consulter le cadran. Cette perte des aiguilles référantes ôte à la montre toute son utilité, voire même une part de son esthétisme. Telle quelle, cette montre traduirait l'absurde d'une splendide technologie conduisant au néant.

Dans le texte biblique qui vous a été lu auparavant, il est également question de perte de référence commune de la part des croyants à qui s'adresse l'auteur de l'écrit. Du moins il y a un sérieux risque de perte référentielle. En effet, des gens qui se considèrent plus éclairés que l'ensemble de la communauté chrétienne johannique prétendent pouvoir se passer de certaines dimensions de la foi au Christ Jésus. Ces gens-là se donnent des airs spirituels au-dessus du commun des croyants et imaginent détenir la véritable foi. Dans leur excès de spiritualité évanescente, ils en arrivent à nier l'existence humaine de Jésus pour n'en faire qu'un être divin qui n'a rien de commun avec les mortels que nous sommes. Au demeurant, ils nient toute l'incarnation du Fils, ils rejettent donc la manière dont Dieu s'est manifesté par Jésus de Nazareth et revendiquent, en outre, une connaissance particulière qui les élève à un rang supérieur d'initié; eux, ils connaissent, eux, ils ont le savoir spirituel, la connaissance qui vient d'en haut. Ils veulent ainsi aiguiller la foi des autres à leur guise.

C'est bien là-contre que se dresse l'auteur de la lettre. Il lutte contre un élitisme spirituel qui désignerait certains croyants comme supérieurs aux autres par leur connaissance spirituelle. Il rappelle donc avec force et rigueur que la foi ne dépend pas avant tout d'une connaissance, mais qu'elle est le fruit d'une relation que Dieu lui-même a rétablie par son Fils.

Et c'est exactement dans cet esprit qu'il introduit ce passage biblique en disant que : "Quiconque croit que Jésus est le Christ est né de Dieu". Ces paroles sont libératrices à plus d'un titre. Quiconque indique que la foi est accessible à tous et qu'elle n'exige pas de connaissance préalable qui garantisse le salut. L'expression "naître de Dieu" exprime chez Jean que c'est Dieu lui-même qui nous fait naître à une autre manière de vivre et d'espérer dans ce monde.

S'attachant à ce qui est essentiel, Jean aiguille le regard de ses auditeurs sur la personne de Jésus-Christ, non pour les inviter à fuir ce monde, mais bien plus pour leur montrer en quoi cette foi en Jésus-Christ trouve des répercutions concrètes dans la vie ordinaire et qu'elle la dynamise pleinement.

Pour cela Jean emploiera des images simples à saisir lorsqu'il dit que Jésus est venu par l'eau et le sang. L'eau indiquant le baptême de Jésus et le début de son ministère comme envoyé du Père, le sang indiquant sa vie humaine vécue parmi nous et donnée à la croix. Ainsi pour lui l'eau, le sang et l'Esprit témoignent tous les trois de l'action de Dieu parmi les humains.

Or, cette réalité spirituelle nous invite, nous aussi, à comprendre notre vie de foi dans cette même direction.

L'eau nous rappelle tout à la fois notre baptême (ou sa confirmation pour certains d'entre nous), mais aussi le fondement même de notre foi, à savoir Jésus-Christ. L'image de l'eau nous convie à nous reconnaître comme mort aux prétentions de ce monde et comme appelé à vivre une vie orientée par celle du Christ, à sa suite. Nous n'avons en tant que chrétien que cette source-là, celle de la vie, mort et résurrection de Jésus qui nous place à nouveau comme des êtres libérés devant Dieu.

Tandis que le sang nous rappelle que notre foi n'est pas fuite vers un ailleurs meilleur, mais que cette foi se vit dans le concret de nos existences, et de plus que notre vie peut devenir, à l'image du Christ, don de soi pour les autres, à l'écoute et au service d'autrui. Et c'est l'Esprit qui nous en donne force et vitalité, c'est l'Esprit de vérité qui nous conduit.

"Etre né de Dieu" n'est-ce pas aussi laisser s'exprimer dans ma vie la foi toujours vive et ravivante du baptême, ainsi que l'engagement généreux envers les humains que Dieu place sur mon chemin ? Car l'Esprit nous invite à être témoins ensemble, par l'eau et le sang, par notre espérance et notre engagement réel, de la présence divine qui rythme la vie aux aiguilles du temps des hommes.

A propos, avez-vous des aiguilles à la montre de votre vie ? Et si oui, lesquelles ?

MESSAGE DE ARMAND HEINIGER

Le pasteur Jean Biondina vient de clore la première partie de notre prédication commune, basée sur le texte de Jean 5, 1-12 par une question pertinente : avez-vous des aiguilles à la montre de votre vie ? Question en rapport avec la vie que Dieu nous propose par cette offre extraordinaire, présentée au début du chapitre : "Quiconque croit que Jésus est le Christ est né de Dieu "!

Si cette vie de Dieu nous habite en réponse à notre foi et confirmée par le témoignage de l'Esprit, puis inscrite dans nos existences par les traces d'un baptême ou d'une confession de foi personnelle ou publique, alors cette vie de Dieu en nous devrait se manifester d'une manière pratique et communicante.

Dans certaines versions de nos bibles, le début de ce chapitre 5 est introduit par un titre. Les rédacteurs de la mise en pages ont voulu attirer notre attention sur les conséquences de cette vie de Dieu en nous.

Voici deux de ces titres en tête de chapitre comme exemples : "La foi et ses conséquences", ou "la foi dans le Fils de Dieu, racine de la charité" (titre plus élaboré). Ces titres font incontestablement référence à ce que l'auteur a voulu transmettre aux lecteurs de son temps. Les siècles d'histoire qui nous séparent du texte original n'ont en rien atténué l'intention première. Oui, dit-il, Dieu vous offre par le Christ le salut, la vraie vie, qualifiée d'éternelle (verset 11) alors laissez paraître, manifestez dans votre quotidien les conséquences de ce cadeau que Dieu vous fait !

Essayons de retrouver quelques pistes de réflexion suggérées par ce texte, qui au-delà de son contenu plus théologique ou des débats de l'époque, débouchent sur des conséquences pratiques incarnées dans nos existences. Et ceci avec l'aide de Dieu et du Saint-Esprit pour nous mettre, nous aussi, en marche ou nous confirmer que nous sommes bien sur la bonne piste.

Voici la première :

Etre né de Dieu, vivre de sa vie, a comme conséquence première d'aimer celui qui comme moi se réclame de la même naissance. Donc une invitation directe et sans exception possible à aimer mon frère, ma soeur en me laissant inspirer par l'amour et l'exemple du Christ. On ne peut prétendre aimer Dieu, sans aimer ceux dont Il est le Père nous rappelle Jean.

Nous ne pouvons pas, honnêtement nous mettre au bénéfice du pardon de Dieu sans que nous exercions aussi le pardon envers ceux qui nous ont blessés ou agressés. Chaque fois que nous disons ensemble ou seul le "Notre Père", nous rappelons cette exigence, certes difficile, parfois presque impossible à vivre, mais qui reste fondamentale et qui accrédite notre confession de foi et notre statut de chrétien.

La seconde piste est liée à l'observation des commandements comme signe ou preuve de notre amour et attachement envers Dieu. Observer ou garder les commandements de Dieu ce n'est pas se mettre sous un joug ou un fardeau comme on l'a souvent cru comprendre ou même enseigné lorsque nous cédons au légalisme. Les commandements de Dieu sont liés à son amour de Père pour sa créature en général. Dieu veille sur sa création, mais plus encore pour ceux qui se réclament de sa bienveillance et de sa miséricorde. Les commandements sont une garantie de notre liberté et nous permettent de vivre au sein d'un monde souvent agressif et destructeur.

Lorsqu'il n'y a plus de références, lorsque l'homme fonctionne en roue libre sans garde-fou, en bafouant les droits ou la liberté de l'autre, nous savons hélas que trop bien ce que cela peut apporter comme désolation et comme souffrance.

Si nous comprenons que les commandements de Dieu ont comme objectif notre sécurité et notre liberté, alors l'observation ou garder ses commandements n'est pas un fardeau, mais bien une protection. On pourrait citer ici l'actualité des dix commandements de l'Ancien Testament, garantie d'un bon fonctionnement d'une société et résumé par Jésus dan le Nouveau Testament par ces paroles : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta pensée et tu aimeras ton prochain comme toi-même!"

Oui, affirme l'auteur "ses commandements ne sont pas un fardeau"!

La troisième piste, nous la trouvons dans ce qui est considéré comme l'épilogue de ce chapitre. Dans cet épilogue, je cite le verset 14 :"voici l'assurance que nous avons devant Lui : si nous lui demandons quelque chose selon sa volonté, il nous écoute!"

Comme conséquence pratique de notre vie en Christ, il n'y a pas seulement l'invitation à aimer notre prochain, à garder les commandements de Dieu, mais l'offre nous est faite de pouvoir lui parler et Il nous écoute ! Invitation extraordinaire à un dialogue avec Dieu, à épancher devant Lui nos souffrances liées peut-être à l'incompréhension rencontrée, au rejet, liées à la maladie, à l'infirmité, à l'âge, à l'isolement.

Au coeur même de nos solitudes, nous pouvons lui parler, Il écoute et Il donne consolation et nous accorde Ses grâces. Que ceux qui nous écoutent, au près comme au loin, dans cette chapelle ou dans vos foyers, puissent se souvenir que quelle que soit leur situation d'aujourd'hui, Dieu le Père par le Fils et l'Esprit écoute et reste attentif à nos besoins. Osons utiliser sans restriction et sans honte cette piste, conséquence de l'accueil sans restriction que le Christ nous fait, qui est celle de la prière ou le cri du coeur.

Puis voici finalement notre dernière piste de réflexion autour de la pratique de notre foi. Elle vient en quelque sorte, clore notre écoute de ce texte. Elle vient éclairer, peut-être notre tristesse ou notre découragement de ce jour, ou ajouter un plus à notre joie et affermir notre foi.

Le texte dit, aux versets 4 et 5 : "tout ce qui est né de Dieu est vainqueur du monde". Et la victoire qui a vaincu le monde, c'est notre foi ! qui est vainqueur du monde sinon celui qui croit que Jésus est Fils de Dieu ?

Etre né de Dieu, avoir des aiguilles à la montre de notre vie, croire que Jésus est Fils de Dieu a pour conséquence de nous rendre partenaires de Sa victoire. Par Lui et par le mystère de la foi, nous sommes vainqueurs de tout ce qui pourrait nous déprimer; avec Lui vainqueur de nos hésitations, de nos lenteurs, de nos insuffisances, avec Lui debout et justifiés devant Dieu, certains de notre identité nouvelle, compagnons du Seigneur, en route chemin sur le chemin vers le Royaume, mais présents parmi nos contemporains comme sel de la terre et lumière du monde.

Amen.

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Détails

Avec la participation de
Jean Biondina, pasteur
Orgue
Silvain Dupertuis, piano
Musique