Le combat contre tout ce qui détruit la vie et ferme l’avenir.

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Écouter le culte :

Nous sommes au cœur d’une foule immense. Jésus et ses disciples tentent de s’y frayer un passage pour se rendre chez Jaïrus, le chef de la synagogue. La situation est urgente : sa fille unique de 12 ans se meurt et Jaïrus supplie Jésus de venir chez lui pour la sauver.

A peine arrivé en bateau sur la rive, que Jésus est déjà sollicité. Mais les gens, au lieu de lui ouvrir un passage, le serrent à l’étouffer. Comme si cette foule d’abord accueillante devenait malveillante. Comme si cette vague humaine tentait inconsciemment de submerger Jésus, de le noyer et de le faire échouer dans sa mission.

Jésus est en route pour prendre soin d’une fille et mettre en échec les forces de mort qui lui barrent l’avenir. Le pronostic vital est engagé pour cette adolescente, une vraie bataille entre la Vie et le Chaos – le chaos qui, dans la Bible, est souvent représenté par la mer ou l’océan. Au début de la Genèse, par exemple, on peut lire : « La terre était informe et vide, les ténèbres planaient à la surface de l'abîme et le souffle de Dieu à la surface des eaux. »

Et justement, Jésus et ses disciples viennent de faire un aller-retour sur la mer de Galilée. A l’aller, ils ont essuyé une tempête qui a failli les faire sombrer ; sur l’autre rive, Jésus a libéré un possédé dont les démons expulsés ont fini dans un troupeau de porcs qui s’est noyé. Et c’est à leur retour qu’ils débarquent face à une marée humaine.

Vous voyez que Jésus est plongé dans un univers aquatique, symbole de Mort et de Chaos. Il fait face à de l’adversité, à la résistance de forces négatives qui contrecarrent son ministère de guérison. Malgré notre attrait pour le féerique, dans lequel Jésus devrait être un héros invincible, calme et souriant, force est de constater que son ministère ne fut pas de tout repos, qu’il fut un combat pour la Vie.

Non, le Christ n’avance pas sur une autoroute dégagée. Il doit ouvrir lui-même la voie, pas après pas, rencontre après rencontre, sans garantie de passage, sur un chemin étroit tracé dans l’instant. Et ce jour-là, Jésus est confronté à de l’infranchissable. Il est encerclé, immobilisé, impuissant, bloqué à 500 mètres d’une enfant qui a besoin de ses soins.

C’est là qu’une femme entre en scène sans que personne ne l’aperçoive. Elle ne veut surtout pas être remarquée, car elle ne devrait pas être là… Elle aussi est confrontée à l’adversité et à l’insurmontable. Cela fait 12 ans qu’elle a des hémorragies intimes. Par-delà sa souffrance physique, cela signifie qu’elle n’a jamais pu accéder à son statut de femme qui, dans la société où elle vit, passe largement par la maternité. En plus, elle a été exclue de la vie religieuse et sociale, considérée comme impure par les prêtres, à cause de sa problématique liée au sang. Mais cette femme est extrêmement courageuse et persévérante. Elle se bat pour rester en vie, elle cherche partout le bon traitement, à tel point qu’elle a maintenant dépensé tous ses biens.

Anémique, isolée, ruinée, elle va tenter le tout pour le tout pour tordre le cou à ce qui l’épuise et la tue à petit feu. Les médecins n’y ont rien pu, elle va se tourner vers Jésus et faire ce geste interdit de toucher le rabbi de Nazareth. Un geste interdit car, étant impure, elle devrait rester à distance et vivre à part sans contact avec les autres. Et là, envers et contre tout, elle va se frotter une foule dense et toucher Jésus secrètement.

C’est sa rage de vivre, son refus du malheur et une incroyable ténacité qui lui font tendre le bras vers Celui dont elle espère tout. Son geste est l’expression silencieuse de son cri : « Seigneur, je n’en peux plus, j’ai tout essayé, je n’ai plus que toi ; sauve-moi, je suis au bout du rouleau… Et je refuse de capituler devant ce qui est injuste, de me résigner à l’intolérable, en ayant renié ce à quoi je crois profondément – que la vie est belle et qu’elle doit aussi être pour moi ! »

Ce geste nous touche car il nous parle de toutes les situations où l’avenir est bouché, où nous ne voyons aucune option, aucune porte de sortie, aucune opportunité, aucun allié.

Malgré tout, cette dame reste en contact avec ce qui est plus-que-vivant en elle. Elle ne se soumet pas, elle se débat avec insistance, quitte à échouer, car résister à ce qui la déshumanise la maintient humaine, son combat inlassable pour la Vie la différencie de ce qui la tue.

Nous avons peut-être connu de telles situations ou nous en connaîtrons. Peut-être que vous y êtes en plein, vous qui nous écoutez, ou un de vos proches.

Le texte précise qu’à ce moment-là, Jésus sent une puissance sortir de lui et demande : « Qui m’a touché ? » Pierre se permet de lui signaler que tout le monde le touche… Et nous devinons que pour Jésus, il y a Toucher et toucher. Quelqu’un l’a touché – autrement ! Et cela a provoqué un mouvement incontrôlé en lui, la Puissance de Dieu en lui est intervenue dans le corps de cette femme pour la guérir de son malheur.

On dirait que sur ce coup-là le Saint-Esprit agit à travers Jésus sans le consulter. Dans l’urgence, Dieu prend l’initiative de répondre à l’attente de cette femme. Jésus s’en aperçoit et ne laisse pas passer cela sans intervenir. Il achève le geste invisible du Créateur en procédant comme lui : par séparation et mise en relation.

Jésus va faire en sorte que « la femme invisible » apparaisse, séparée de la marée humaine, sortie de l’anonymat, libérée de la honte, et que sa parole devienne distincte pour tout le peuple. Tiens, la foule est soudain devenue un peuple… nous y reviendrons.

Ce jour-là, l’impure et la délaissée devient une personne à part entière qui raconte son histoire, son geste fou et l’action de Dieu. Encore une fois, Jésus ne fait que prolonger le geste du Père quand il lui dit : « Ma fille, ta foi t’a sauvée : va en paix. »

Nous ne saurions rien de cette expérience, si Jésus n’avait pas demandé : « Qui m’a touché ? » Une question que Jésus nous pose aujourd’hui encore, à toi, à moi : « Me touches-tu ? Dans quel domaine vas-tu à l’encontre du désespoir ambiant pour accomplir ton geste de confiance en moi ? Crois-tu que je suis la Résurrection et la Vie et qu’il n’y a en moi aucune connivence avec les puissances de Mort et de Chaos ? »

L'Évangile de ce jour fait sortir de l’ombre tous nos gestes discrets d’investissement pour la vie, tous nos actes de résistance contre ce qui la détruit et l’aliène. Tous ces gestes dont nous pourrions désespérer, car ils ne sont pas reconnus, pas médiatisés, pas rémunérés… mais ils touchent le cœur de Dieu car ils lui ressemblent.

Et même si cette femme n’avait pas été identifiée et rétablie dans la société des humains, même si elle n’avait pas été guérie, son geste n’en serait pas moins resté magnifique. Car ce n’est pas le résultat qui lui donne sa valeur, mais sa connivence avec le geste-même de Dieu.

De manière subtile, nous découvrons comment Jésus collabore avec l’Acte créateur et recréateur de Dieu, qui passe par lui, mais qui le dépasse et le déborde complètement. Jésus constate que même s’il est submergé et empêché d’avancer, cela n’empêche pas le Père d’agir à travers lui, de répondre au cri silencieux d’une femme en agonie et de guérir sa blessure intime.

Cette expérience lui donne une confiance et une paix qui lui permettent de dire à Jaïrus dont la fille a eu le temps de mourir : « N’aie pas peur, crois seulement et elle sera sauvée ! »

Permettez-moi de vous rendre attentifs à un détail du texte : le nombre douze qui apparaît trois fois. C’est le nombre de tribus dans le Peuple de Dieu, le symbole de l’Humanité qui essaie de vivre en fonction de Dieu. C’est dire que les personnages de cette histoire représentent davantage qu’une adolescente, une femme et une poignée de disciples.

Notre texte nous parle de la manière dont Dieu sauve l’Humanité, comment il vainc les forces de Mort et de Chaos et comment il fait lever le Peuple de l’Espérance.

La première étape consiste à juguler le malheur, à cicatriser les blessures intérieures, à cautériser ce qui rend nos histoires tristes et stériles.

La deuxième étape, Jésus l’accomplit chez Jaïrus : il rend souffle à la vie, relève l’avenir et permet à nos histoires d’entrer dans une nouvelle fécondité.

Avez-vous remarqué que Jésus ne laisse entrer que 3 disciples et les 2 parents avec la fille et lui : 7 personnes qui rappellent les 7 jours du Commencement.

La troisième étape, Jésus revêt ses disciples de la Puissance qui agit en lui et leur confie la Parole créatrice et recréatrice pour qu’ils contribuent, à leur tour, à transformer des vies. Ces envoyés vont démultiplier son action dans les villes et les villages alentour.

Ce sont les trois temps de la Création :
- Maîtriser et repousser le Néant et le Chaos
- Amener toutes choses à l’Existence et à la Vie
- Bénir l’Humanité, en l’invitant à remplir la Terre, en lui déléguant la mission d’en prendre soin à la manière de Dieu.

Nous avons constamment à choisir notre camp. Jésus a choisi le sien : le camp de la Vie et de l’Amour, envers et contre tout, à chaque instant, jusqu’au dernier. Nous aimerions tant vivre dans un monde dont la Mort et le Chaos ne fassent pas partie. Ce serait tellement plus simple, plus agréable, plus reposant. Mais ce n’est pas le cas.

Pour la Bible, croire que « l’Univers nous veut du bien » n’a pas de sens. L’Univers se fiche pas mal d’une poignée d’Homo Sapiens sur leur caillou bleu.

Si tu crois en la Vie et en l’Amour, c’est que tu ressembles à Dieu, ton Créateur, qui nous donne la Vie et qui nous aime, c’est que tu fais déjà partie du Peuple de l’Espérance. Oui, c’est un peuple, une famille : tu n’es pas seul. Alors, quand ça va ou quand ça va pas, quand tu avances ou quand tu perds pied, quand tu te sens porté ou submergé… ne désespère jamais de la Vie et de l’Amour : « Ne crains pas, crois seulement, et tu seras sauvé ! »

Cherche le contact avec Jésus-Christ, invite-le à venir dans ta maison, laisse-le déployer la Vie de Dieu en toi, et autorise-le à passer par toi pour démultiplier son Amour. Tel est le chemin qui nous garde en espérance. Le reste est entre les mains de Dieu.

La foi dans la Bible n’est pas tellement une croyance. Il s’agit davantage d’un geste qui vient du coeur en réponse à la personne du Christ et au message de l’Evangile. Les femmes au temps de Jésus n’avait pas la parole en société. Elles ont souvent passé par de magnifiques gestes pour exprimer leur foi et leur amour pour Jésus.
Rencontre de la femme qui a des hémorragies depuis 12 ans et qui a tout tenté pour se soigner. Finalement, elle va discrètement toucher le vêtement du Christ pour recevoir la guérison.
Second culte d’une série intitulée « Les gestes foi de trois femmes audacieuses ».
Le premier de l’Avent, Crêt-Bérard à pour tradition, comme dans une vingtaine de paroisse du Canton, d’être accueilli par des Cavaliers qui lisent le Message du Début de l’Avent. Pour mettre en valeur cette tradition la cavalière lira son message durant le culte et à cheval.

Crêt-Bérard est une Maison de prière qui organise des retraites et accueille de nombreux séminaires d’entreprises, associations, Hautes Ecoles et Universités. La Maison vit au rythme des trois offices quotidiens et du culte hebdomadaire. A la frontière entre tradition monastique et service hôtelier, Crêt Bérard propose une hospitalité spécifique empreinte de sérénité, d’authenticité et d’humanité.

Détails

Avec la participation de
Caroline Glardon, Annette Demaurex, Sandra Sollberger,
Orgue
Musique
Choeur polyphonique, sous la direction de Céline Grandjean, Céline Granjean, piano.