C'est pas bientôt fini ce boucan ? Y en a qui voudraient bénir ici !

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On pourrait rester sans mots, le cœur transi par la noirceur qui défait le monde. On vit aujourd’hui sous les décombres de l’espérance. Mais survient une étrange urgence, une urgence qui est fidélité à une autre histoire, à une autre mémoire. La nuit déchirée, le désert visité, et la lumière qui se fait enfant. Une parole est née à l’aplomb des ténèbres, douce et tenace.
Ce sont ces mots, que j’emprunte à Francine Carrillo, qui soulignent une des grandes questions de Noel : Qu’est-ce que ça change ? Qu’est-ce que la naissance d’un enfant peut venir nous dire dans un monde qui est troublé, dans un monde qui encore souvent se laisse envahir par les ténèbres. Qu’est-ce que la venue d’un enfant vient changer à tout ça ?

Pour y répondre, j’emprunte les mots d’un autre poète, le poète indien Rabindranath Tagore qui nous dit : La naissance d’un enfant est le signe que Dieu n’a pas encore perdu espoir en l’humanité. Nous, qui sommes rassemblés en ce matin de Noël pour célébrer une naissance, une naissance qui n’est pas n’importe laquelle, une naissance du Fils de Dieu. Il est bon de nous rappeler, de nous recentrer sur le sens profond de cette naissance. Vous le savez dans l’histoire de la Bible, dans l’histoire de la foi, Dieu se révèle de différentes manières. L’Ancien Testament nous explique tout le grandiose, tout le superbe de Dieu, ce Dieu qui se révèle tonitruant, qui parle du haut de toutes les étoiles, qui a une voix à faire trembler tous les murs, qui parle depuis le haut du Sinaï au milieu d’une grande colonne de nuée, ce Dieu dont la parole sème l’effroi. Ce Dieu face à qui nous sommes vraiment très peu.
Par la suite, Dieu se révèle autrement, Dieu s’approche de son prophète Elie. Elie est appelé à le reconnaître dans ce grand passage que beaucoup connaissent presque par cœur. Elie qui attend Dieu qui se révèle ni dans le tremblement de terre ni dans la grande tempête, mais qui se révèle par un souffle léger, discret, ce Dieu qui tout d’un coup se révèle à nous par ce qu’Il effleure, par un Dieu qui ne fait que passer, qui délicatement caresse l’être humain de sa douce main. C’est ce que nous rappelle cet Epitre aux Hébreux, de ce Dieu qui à maintes reprises a parlé à nos ancêtres de plusieurs manières et maintenant à la fin des temps, Il nous parle à travers son Fils.
Là bien sûr, la fin des temps est un terme qui peut nous faire un peu peur mais la fin des temps est aussi ce qui annonce le nouveau temps, quelque chose de neuf qui revient, qui annonce un temps basé sur d’autres règles, d’autres lois, un temps qui ouvre le royaume de Dieu, un temps qui se nourrit d’amour, d’espérance, de foi. C’est ce qui se passe dans cette ultime révélation, de Dieu qui vient sous la forme d’un enfant, un petit enfant entouré de sa famille, de quelques curieux, des curieux qui ont plus ou moins été invités fortement à aller lui rendre visite on est d’accord, mais qui quand même se retrouvent là auprès de ce petit enfant.
Il y a quelque chose de très profond et de très riche de voir ce Dieu dont on pourrait très facilement se dire que tout doit dépendre qui vient sous la forme d’un enfant qui doit pleinement dépendre de tout le monde. Un nouveau-né qui vient dans le monde, s’il y venait seul il y serait bien malheureux. Il a besoin de beaucoup d’accompagnement, de beaucoup de présence, beaucoup de tendresse pour qu’un nouveau-né devienne pleinement un humain. Et quand Dieu choisit de venir sous la forme d’un enfant alors qu’Il aurait bien pu juste survenir, advenir dans le monde pleinement formé du haut d’une sagesse déconcertante. Il aurait juste pu prendre l’ascenseur depuis son nuage pour arriver le jour de ses trente ans, se faire baptiser par Jean-Baptiste. Mais non, il vient comme un enfant. Il vient comme pour montrer la voie que ce que Dieu veut apprendre de nous et veut nous apprendre et de vivre dans cette douce dépendance face aux gens qui nous aiment, que nous aimons.
Il y a dans cette naissance quelque chose qui m’évoque cette phrase d’Hetty Hillesum, qui au milieu d’une grande noirceur est arrivée à la conclusion suivante : Il m’apparaît de plus en plus clairement que Dieu ne peut pas nous aider, mais que c’est à nous d’aider Dieu et de défendre jusqu’au bout la demeure qu’Il abrite en nous. Je crois que Noël nous apprend fortement que nous sommes invités à reconnaître Dieu comme un tout petit enfant, un tout petit enfant qui sommeillait il y a deux mille ans et qui sommeille encore quelque part en nous, ce petit enfant que nous avons tous au creux de nous-mêmes, que parfois la vie nous fait un peu oublier, parfois la vie nous dit : T’es un peu trop indiscipliné, parfois aussi un peu trop vivant, un peu trop joyeux, un peu trop fou. On grandit souvent en quittant un peu de son enfant intérieur et pourtant Dieu nous dit que c’est là qu’il y a quelque chose qui nous touche, qu’il y a quelque chose qui nous rejoint.
Alors moi, je n’ai pas encore la chance d’avoir goûté encore à ce doux sentiment d’être père. Si je ne dors pas la nuit ce n’est uniquement par de longues méditations incessantes de l’Evangile et de pieuses prières et non par des réveils de cris incessants. Mais par contre, j’ai la chance d’être depuis quelque temps parrain d’un petit bout de chou. Il y a quelque chose qui moi me remplit de beaucoup de joie, beaucoup de bonheur à chaque fois que je vais voir ma filleule et j’étais frappé une fois. Je me suis rendu chez elle, enfin dans la maison que ses parents lui prêtent. Eh bien, j’étais content d’être avec ma filleule donc. J’ai pris pas mal de temps à porter ma filleule et au bout d’un moment mon bras a fatigué terriblement. La dernière fois que je l’avais vue, elle était toute, toute petite. Elle avait juste un peu grandi. Alors j’ai dit aux parents : Vous êtes remarquables, vous devez être costauds, avoir de bons bras, de bons muscles, moi je suis épuisé. Et là, ils m’ont dit avec une grande sagesse : Eh ben, nous, on grandit avec au quotidien. Alors bien sûr la fatigue est un peu là, mais nos muscles se forment à mesure qu’elle grandit. Moi, qui ne vais pas voir qu’une fois toutes les quelque semaines, je n’ai pas le temps d’adapter ma musculature à sa croissance.
Je crois qu’il y a quelque de très riche là-dedans, dans cette image de se dire qu’avec un bébé, avec un enfant on adapte notre musculature à sa croissance. Et je crois qu’avec Dieu c’est pareil. On est invité à commencer à reconnaître Dieu comme étant celui qui a pleinement besoin de nous, à reconnaître pleinement que Dieu dépend entièrement de nous. Bien sûr, Dieu nous a créés par sa volonté, mais nous sommes aussi ce dont Dieu a besoin. Et au fur et à mesure que nous avançons, cheminons avec Dieu, notre musculature se forme à Lui. A mesure qu’Il croît en nous, nous croissons également en Lui et par Lui. Et c’est pour cela que Noël survient chaque jour car il nous faut souvent réapprendre à voir Dieu comme ce nouveau-né.
Le texte de Jean nous dit bien à quel point c’est quelque chose de concret Dieu qui vient dans le monde, Dieu qui vient et qui devient chair. C’est le grand pari que l’histoire de la foi n’est pas faite de lettre morte mais de paroles vivantes. Quand je lis ce texte de Jean que ce verbe, ce logos, cette parole qui vient sur terre, je ne puis m’empêcher de me dire que Dieu est venu nous offrir un langage, est venu nous dire : le langage que je veux parler est le langage d’un tout petit, un langage qui ne comprend que la tendresse, un langage qui n’est rempli que de bienveillance. Là, je crois que nous sommes invités dans tous ces temps de Noël à nous dire : oui, la naissance d’un nouveau-né, la naissance d’un enfant est toujours un rempart des plus solides, des plus tenaces contre toute obscurité qui survient car en chaque naissance nous sommes invités à nous ajuster à ce langage de tendresse et à reconnaître à quel point Dieu a besoin de nous et à quel point nous avons tellement à grandir en Lui.

Amen !

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Noël se prépare en fanfare. Les anges l'annoncent au son des trompettes. Nos repas de fête se vivent dans un joyeux brouhaha, jusqu'à ce que les inévitables histoires familiales remontent troubler la quiétude.
Tout ça pour quoi? Pour un petit gamin dont les langes peinent à contenir la lumière… Est-ce que véritablement cette naissance justifie autant de bruit? N'aurait-il pas pu simplement tomber d'un nuage ou profiter du billet retour du char d'Elie?

Détails

Avec la participation de
Anthony Staines
Orgue
Christiane Guhl
Musique
Choeur paroissial, sous la direction de Norbert Cuhat et Tamara Gasteiner, avec Sylvie Gomez, soliste, et Norbert Cuhat, guitare