Quand la Bible invite à profiter de la vie.

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Écouter le culte :

J’aimerais commencer notre méditation par cette citation anonyme :

« Il n’est peut-être pas de meilleure recette pour rester jeune que de consacrer son énergie à autre chose. »

Aujourd’hui, tout nous attire vers la jeunesse : les magazines que nous lisons, les vitrines des centres commerciaux devant lesquels nous passons, les films que nous regardons, les publicités que nous comparons, les crèmes anti-rides que nous achetons.
La société nous pousse vers un culte de la jeunesse qui devient un objectif de vie, voire une vertu.

Pourtant, RIEN n’a jamais ralenti le vieillissement de l’être humain et RIEN non plus ne l’a jamais épargné d’une mort certaine…
Au mieux, on vit plus longtemps qu’avant et on quitte ce monde plus âgé qu’avant. Mais la mort est inéluctable.

Alors, quel est le sens de la vie, pour vous dans cette église ce matin et pour vous qui nous écoutez depuis votre salon, dans votre voiture ou ailleurs ? Le but de la vie est-il réellement de rester jeune, comme notre société nous invite à le croire ? Et dans ce cas, si le meilleur moyen de le rester est de consacrer son énergie à autre chose, à quoi devons-nous la consacrer ?

Un homme de l’Ancien Testament a beaucoup réfléchi à cette question et a mis le fruit de sa réflexion dans un livre qui nous est parvenu. Cet homme, c’est l’Ecclésiaste, que l’on appelle aussi le Qohéleth. Un personnage dont on connaît peu de choses avec certitude, ce qui n’est pas plus mal, car son anonymat, tout comme celui de notre citation de départ, permet à chaque homme, chaque femme de toute époque de s’identifier dans ses propos.

Récemment, j’ai entendu à plusieurs reprises des amis me dirent que le message de l’Ecclésiaste pouvait se résumer en cette seule phrase : « La vie ne vaut pas la peine d’être vécue. » Un constat éminemment pessimiste, donc.

Il est vrai que l’Ecclésiaste n’hésite pas à poser des questions existentielles. Il fait un bilan de la condition humaine, comme nous en faisons parfois aussi lorsque nous regardons en arrière et analysons notre parcours. Nous y voyons les réussites, mais aussi les échecs, les espoirs déçus, mais aussi les surprises inattendues, etc.

Toutes ces choses apparaissent dans le bilan de l’Ecclésiaste. Heureusement pour nous, il ne s’arrête pas là ! Son analyse le pousse à chercher au-delà, à s’interroger sur cette question que nous nous posons aussi aujourd’hui : à quoi consacrer mon énergie ?

Le premier constat de l’Ecclésiaste porte sur une injustice frappante : les bons comme les méchants ont le même sort, leur vie les mène à la mort. Peu importe leurs actions sur terre, leur dévouement, leur piété, ils vont tous vers un même terminus.

Quelle injustice ! Car ni les méchants, ni surtout les bons n’obtiennent un sursis. Et même celui qui accomplit un rite religieux, nous dit le texte, n’obtient aucun sursis. Un rite religieux : aujourd’hui on pourrait parler de celui qui va à l’église, qui récite ses prières, qui donne sa dîme. Même cette personne-là n’obtient aucun sursis. Quelle injustice…

Et d’un autre côté : quelle justice ! Car, nous dit l’Ecclésiaste au premier verset, « tout est dans la main de Dieu ». C’est lui qui nous offre en premier lieu cette vie et qui nous aide à la parcourir. Même si cette vie est remplie d’inconnues et nous mène vers un au-delà dont nous ne connaissons presque rien, toute notre vie dépend de ce Dieu-là et non pas, par exemple, d’un tribunal d’hommes qui jugeraient la valeur de nos actes. Quelle justice…

Mais alors, une question se pose. Si les bons comme les méchants subiront un même sort, quel intérêt trouverions-nous à faire le bien ? La plupart du temps, faire le bien nous coûte, ce n’est pas une solution de facilité. Cela nous coûte de travailler pour mériter son salaire, plutôt que de mener de petites arnaques à gauche et à droite pour économiser de l’argent. Cela nous coûte de réviser pour un examen plutôt que de tricher sur la copie du voisin. Cela nous coûte de nous montrer fidèles vis-à-vis de nos amis, plutôt que de colporter de petits ragots qui nous permettent de nous élever.

Et pourtant, ceux qui font le bien ne s’en sortent pas forcément mieux dans la vie que les autres. Dans ces circonstances, ne vaudrait-il pas mieux mourir tout de suite que de s’acharner à faire le bien et de voir les malhonnêtes s’enrichirent ?

Malgré ces constatations et malgré l’étiquette « pessimiste » que l’on colle volontiers sur l’Ecclésiaste, celui-ci nous apporte à ce stade une belle lueur d’espoir. Car pour lui, c’est évident, la vie vaut mieux que la mort. Et même plus, car au verset 4, il dit : « Un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort ». Le chien, à cette époque, c’est un animal méprisé ! Un animal sauvage, sale, qui mange les cadavres. À cette époque, le chien, ce n’est pas le chihuahua à la Paris Hilton ! Le lion par contre est un animal noble, symbole de la force, symbole de la royauté. D’ailleurs, aujourd’hui encore on parle de lui comme du « roi de la savane ».
« Un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort ». Pour l’Ecclésiaste, donc, il vaut mieux vivre, même misérablement, qu’être mort.

Puisque la vie vaut mieux que la mort, l’Ecclésiaste nous lance deux invitations qui seront les réponses à notre question : « À quoi consacrer mon énergie ? » La première invitation est la suivante : profitons de la vie, profitons de notre temps sur terre. Autrement dit : Carpe Diem !

« Va, mange avec joie ton pain, et bois gaiement ton vin : car dès longtemps, Dieu prend plaisir à ce que tu fais. » (v. 7)

N’est-il pas réjouissant de savoir que Dieu prend plaisir à ce que nous faisons ? Il prend plaisir à qui nous sommes, à quelles sont nos passions, à nos activités… Tout cela ne le rend pas indifférent, car il nous aime.

Dans ces circonstances, c’est à notre tour d’avoir du plaisir à ce que nous faisons. De le faire avec joie. De se réjouir des petites choses comme du pain que nous mangeons et du vin que nous buvons.

En même temps, de ce verset se dégage presque un sentiment d’urgence : ne tarde pas à profiter de ce que tu as, profites-en maintenant. N’attendons pas pour profiter d’être jeunes, d’être à la retraite, d’être en bonne santé, d’avoir une maison, d’avoir une famille, d’avoir des amis. Si Dieu prend plaisir à ce que nous faisons, pourquoi n’y prendrions pas plaisir aussi immédiatement ? Pourquoi attendre d’autres états, espérer d’autres biens ?

Je vous invite à réfléchir en votre for intérieur : y a-t-il des choses dont vous avez honte de profiter aujourd’hui ? Dans votre famille, vous avez peut-être honte de dire que vous aimez sortir boire un verre ou deux avec des amis ? Dans votre travail, vous avez peut-être honte de dire que vous partez en voyage ? Dans votre église, vous avez peut-être honte de dire que vous ne viendrez pas au culte parce que vous souhaitez passer du temps avec votre famille, vos voisins, votre époux(se) ?
Pourquoi ce sentiment de honte ? Est-il légitime, et peut-être doit-il l’être ? Ou passez-vous à côté de cet appel de Dieu : prends plaisir à ce que tu fais !

La seconde invitation de l’Ecclésiaste se trouve au verset 10 :

« Tout ce que ta main trouve à faire,
avec ta force, fais-le. »

Soyons actifs ! Ici l’horizon s’élargit. Il ne s’agit pas seulement de profiter de la vie, les pieds en éventail sur une belle plage de sable blanc et un cocktail à la main. Il ne s’agit pas que de cela : nous avons un rôle à jouer.

« Tout ce que ta main trouve à faire (…), fais-le » Il y a une notion de mise en mouvement : accomplir les activités de la vie, de tous les jours, celles qui sont à notre portée. Autrement dit : soyons actifs aujourd’hui.
Et les activités de tous les jours, ce n’est pas seulement de presser les fameux citrons du cocktail cité plus tôt. Non, car ce verset formule aussi une réponse à l’interrogation de l’Ecclésiaste : faut-il vraiment consacrer son énergie à faire le bien ? Oui, en tout temps, à chaque instant, car « tout ce que ta main trouve à faire (…), fais-le. »

Cela inclut, je crois, les activités qui nous plaisent et celles qui nous sont moins agréables : aller au travail, aider un ami qui est dans le besoin, porter compagnie à une personne seule, agir pour le village/la ville où nous habitons, porter la valise de la dame âgée qui essaie de prendre le train.

Arrivés à ce point, vous êtes peut-être découragés : vous avez apprécié la première partie qui nous invitait à profiter, un peu moins la deuxième qui nous met en mouvement. En effet, avec tout cela, où s’arrêter, comment ne pas s’épuiser ? Il y aurait tant de choses à faire autour de nous : comment faire le tri et comprendre quels sont les domaines dans lesquels Dieu nous appelle ? Rassurez-vous, l’Ecclésiaste prend soin de nous et nous donne une astuce à l’aide de cette formule que vous avez entendue, mais peut-être pas relevée :

« Tout ce que ta main trouve à faire,
avec ta force, fais-le. »

Nos actions dépendent de ce que nous sommes capables de faire, des limites de notre propre force. C’est à nous d’évaluer nos capacités, de connaître ou de reconnaître nos limites.
Nos actions dépendent aussi de ce que Dieu aime que nous fassions. Il y a un bel équilibre dans ce texte : entre jouissance et activité, entre dévotion à Dieu et sagesse dans nos engagements.

Revenons à la citation avec laquelle nous avons commencé cette méditation :

« Il n’est peut-être pas de meilleure recette pour rester jeune que de consacrer son énergie à autre chose. »

J’aimerais vous dire que si vous consacrez votre énergie à mettre en pratique ce que nous avons médité ce matin… eh bien, vous ne resterez pas plus jeunes que les autres.
Car la foi chrétienne ne nous promet pas de rester jeunes, même si nous consacrons notre énergie aux œuvres qui plaisent à Dieu.

La foi chrétienne, par contre, nous montre comment vivre la vie telle qu’elle est, en compagnie de Dieu. Elle nous montre, à travers les enseignements de l’Ecclésiaste, à quoi consacrer notre énergie. D’une part à profiter des biens de Dieu, de ce qu’il nous a donné dans notre vie. D’autre part à nous rendre nous-mêmes actifs pour mieux vivre cette vie et, peut-être, pour permettre à d’autres de mieux la vivre.

La foi chrétienne, par ailleurs, nous promet bien plus que ces faux espoirs de la société liés au culte de la jeunesse. La foi chrétienne nous promet une « éternelle jeunesse », une vie parfaite, dans la présence du Père, dotés d’un corps glorifié. La foi chrétienne nous donne l’espérance de cette vie éternelle parfaite à laquelle nous avons accès lorsque nous recevons le pardon de Dieu et devenons ses enfants.

Cette vie éternelle est un réel espoir pour nous. Ce n’est pas pour rien que Paul s’est exclamé dans sa lettre aux Philippiens : « mourir m’est un gain ! » (Phil 1.21). Non, il n’était pas dépressif, il n’était pas confronté à des pensées suicidaires ! Mais il était porteur d’une espérance de vie meilleure.

Alors effectivement, à quoi sert-il de consacrer son énergie ici-bas à poursuivre une jeunesse qui nous échappe forcément ? Ou à poursuivre d’autres buts inatteignables, tels que la richesse, le succès, la reconnaissance, etc.

Consacrons plutôt notre énergie à profiter des possessions que nous avons la chance d’avoir et à nous rendre actifs, au service de Dieu. Le reste est entre les mains de Dieu : même si on ne voit pas le tableau d’ensemble que Dieu est en train de peindre à travers nos actions…

Dans notre vie, nous sommes comme sur une échelle dont nous gravissons peu à peu les échelons. Plus nous montons, et plus nous pouvons voir au loin, comprendre le plan de Dieu en voyant la vue d’ensemble dans notre vie.
Alors que l’équipe de louange va nous entraîner dans un temps musical, j’aimerais vous inviter à réfléchir à votre propre vie :
Quel est l’échelon que je peux gravir ?
- De quoi pourrais-je mieux profiter ? Quel est le don que Dieu m’a fait et dont je ne profite pas encore pleinement ?
- Quelle action à ma portée, dans mes capacités, je peux entreprendre pour vivre la vie telle qu’elle est, sous le regard de Dieu ?

Prenons le temps de réfléchir à ces questions, de nous positionner devant Dieu et de lui remettre nos pensées dans la prière.

« Il n’est peut-être pas de meilleure recette pour rester jeune que de consacrer son énergie à autre chose. » Cette citation anonyme nous renvoie à la préoccupation la plus profondément enfouie en tout être humain: celle de la mort. À l’occasion de ce culte, (re)découvrons comment vivre notre vie d’aujourd’hui dans la sérénité et l’espérance.

Détails

Avec la participation de
Christian Pellé
Orgue
Musique
Laurénie Sulliger, Odile Nkashama et Marilia Guiramles au chant, David Vogel, piano, Timothé Rochat, batterie, Solène Berthoud, flûte traversière et Monique Guirameles, guitare