Le culte radio, entre la Suisse et le Mozambique (1/3)

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Une semaine après Pâques, le Christ vivant nous permet de vivre ce culte en lien, en communion avec vous, chers auditeurs et avec la paroisse de Filadelfia, près de Maputo au Mozambique. Le Christ vivant attesté par notre récit de la fin de l’évangile de Jean. Ce récit me conduit à vous partager quelques réflexions.
Il faut en premier lieu situer le contexte et le climat de cette scène. Jésus a été assassiné, il a fini lamentablement, il est tenu pour mort définitivement par ses compagnons qui sont revenus à leurs occupations professionnelles antérieures. La non-reconnaissance de Jésus par ses disciples n’a donc rien d’étonnant; de plus, Jésus ressuscité appartient à un monde autre, qui ne présente pas les mêmes caractéristiques physiques que le nôtre. Il faudra donc la foi, l’illumination du cœur pour le reconnaître. Il faut accepter de faire ce que propose l’inconnu pour en expérimenter la générosité et la fécondité.
On doit encore se montrer attentif au fait que le Ressuscité va rencontrer les siens sur les lieux de leur travail. Le Christ vivant se rencontre là où nous sommes, là où nous en sommes. La Galilée, c’est le lieu de l’existence ordinaire et quotidienne. C’est aussi le pays des Gentils, c’est-à-dire des non-croyants, des païens, par opposition à la Judée, patrie du peuple élu avec Jérusalem, la ville sainte. Le Christ ressuscité ne souhaite pas être objet de vénération ou même de spéculation, non il rejoint ses amis dans leur lieu de vie pour être avec eux dans leur service quotidien de disciple. En dehors de sa Présence, les efforts demeurent vains, c’est cela qu’exprimait déjà le psalmiste : « Si le Seigneur ne garde la Cité, la sentinelle veille inutilement ; si le Seigneur ne bâtit la maison, le maçon se fatigue pour rien. » (Ps. 127). Quelqu’un doit désigner nos véritables objectifs, qui ne situent pas dans le prolongement naturel de notre logique. La rencontre du Christ opère un changement de cap. C’est dans l’ordinaire que va survenir l’extraordinaire.

Jean utilise des chiffres hautement symboliques : il mentionne 7 disciples, le chiffre 7 signifie la totalité : tous les disciples contemporains et à venir sont donc concernés par cet épisode. Ensuite, le chiffre de 153 affectant le produit de la prise merveilleuse ; saint Jérôme remarque que les naturalistes de l’Antiquité dénombraient 153 espèces de poissons, selon Saint Augustin, 153 est un nombre triangulaire, égal à la somme de tous les nombres de 1 à 17 (spéculation arithmétique courante dans l’Antiquité), le symbolisme jouerait fort subtilement sur ce nombre 17, 10+7, ces deux composants figurant l’un la multitude, l’autre la totalité. Ainsi les poissons de cette pêche merveilleuse représenteraient la multitude des hommes appelés et conquis par la mission chrétienne. Cette lecture me paraît être encore confirmée par le vocabulaire utilisé par l’évangéliste.
Les poissons symbolisent donc les hommes et les femmes « pris » par l’annonce de l’Évangile (au sens où l’on est pris par la parole convaincante de quelqu’un). Le verbe « tirer »(tirer le filet) comporte dans le reste de l’Évangile le sens de tirer les hommes vers Dieu, vers le Christ : « Quand j’aurai été élevé de la terre, je « tirerai » les hommes vers moi. » (Jean 12, 32).
Dès lors ces quelques découvertes dans notre passage de l’évangile de ce jour nous permettent de faire un rapprochement de notre texte avec celui bien connu de la vocation des disciples chez Marc : « Venez avec moi, et je vous ferai pêcheurs d’hommes. » (Marc 1, 17) Dans cette finale de l’évangile de Jean, il y a donc une exhortation à la mission, un appel du Ressuscité à ses amis à témoigner de la vie de Dieu et en Dieu. Il y a aussi une remarquable prévenance, une tendresse du Ressuscité puisqu’il invite ses disciples à reprendre force et courage en partageant son repas.
Depuis une dizaine d’années, notre paroisse a tissé des liens avec la paroisse de Filadelfia, près de Maputo au Mozambique, en particulier avec son pasteur-fondateur Valente Matsinhe. Avec d’autres, nous avons modestement aidé ces frères et sœurs mozambicains dans leur projet : la construction d’une grande église pour mieux accueillir l’importante communauté des fidèles. Grâce à de nombreux contacts, nous avons beaucoup reçu de ces frères, soucieux de répondre à cet appel du Christ ressuscité. Un ami commun, excellent connaisseur du Mozambique décrivait ainsi cette communauté : « C’est une paroisse vivante, avec des membres qui sont des forces vives engagées dans la cité.»
A l’heure où nous méditons cet épisode évangélique, comment ne pas rapprocher le nom de cette paroisse « Philadelphia » (qui signifie amour des frères), avec la parole de l’apôtre Jean dans sa première lettre : « Nous savons que nous avons quitté la mort pour entrer dans la vie ; nous le savons parce que nous aimons nos frères. » (1 Jean 3, 14). Oui, qu’il en soit ainsi pour nous tous !

Détails

Avec la participation de
Orgue
Daniel Chappuis
Musique